Dimanche 7 septembre, la place Saint-Pierre de Rome vibrera d’une ferveur particulière. Le pape Léon XIV présidera ce jour-là la canonisation conjointe de Pier Giorgio Frassati et de Carlo Acutis, deux figures jeunes, séparées par près d’un siècle mais unies par la radicalité de leur foi et leur proximité avec la jeunesse catholique. Cet événement, qui rassemblera des milliers de pèlerins venus d’Italie et du monde entier, s’inscrit dans le cadre du Jubilé de l’Église et sera diffusé en direct dans le monde entier, offrant à chacun la possibilité de suivre la messe depuis chez soi. (Messe de canonisation – YouTube).
Pier Giorgio Frassati naquit à Turin en 1901, dans une famille bourgeoise influente. Très tôt, il manifesta un attrait profond pour la foi, rejoignant la Congrégation mariale et l’Apostolat de la prière. Fait rare à l’époque, il reçut l’autorisation de communier quotidiennement. Étudiant, il devint un militant actif de l’Action catholique et du Parti populaire, s’inspirant des principes de l’encyclique Rerum Novarum.
Il fut également une figure centrale du congrès de Pax Romana en 1921, qui cherchait à unir les étudiants catholiques du monde entier pour promouvoir la paix. Alpiniste passionné, il voyait dans la montagne une école de liberté et de contemplation, résumée par sa devise « Verso l’Alto », « toujours plus haut ».
Mais Frassati n’était pas seulement un contemplatif, il était aussi un homme d’action : il soignait les pauvres, visitait les malades, défendait les marginalisés et n’hésitait pas à s’opposer au fascisme. Avec ses amis, il avait fondé la « Compagnie des types louches », un groupe joyeux où la camaraderie s’alliait à la charité active. Il affirmait : « La charité n’est pas suffisante : il faut aussi amener les pauvres au Christ. »Sa vie fut brisée en 1925 par une poliomyélite foudroyante, probablement contractée auprès des malades qu’il visitait. Il avait 24 ans. Son engagement, son humour et sa piété marquèrent tellement ses contemporains que Jean-Paul II le béatifia en 1990, le présentant comme « l’homme des Béatitudes » et le proclamant patron des Journées mondiales de la jeunesse.
Lors de son exhumation en 1981, son corps fut retrouvé intact et transféré à la cathédrale de Turin, lieu de pèlerinage pour de nombreux jeunes. Deux miracles ont confirmé sa canonisation.
Le premier, en 1933, fut la guérison de Domenico Sellan, atteint d’une tuberculose osseuse incurable. Le second, reconnu officiellement en novembre 2024, concerne Kevin Becker, un jeune Américain plongé dans un coma après un grave traumatisme crânien. Alors que les médecins avaient perdu tout espoir, sa famille invoqua Frassati. Deux semaines plus tard, Kevin se réveilla sans séquelles. Le cardinal Marcello Semeraro, préfet du Dicastère pour les Causes des Saints, signa le décret validant ce miracle le 25 novembre 2024.
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Un siècle plus tard, une autre figure de jeunesse, très différente dans son contexte mais semblable dans son amour du Christ, allait marquer l’Église : Carlo Acutis.
Carlo Acutis,naquit en 1991 à Londres et grandit à Milan. Fils unique d’une famille italienne, il mena une vie ordinaire mais profondément enracinée dans la foi. Dès son enfance, il se distingua par son amour de l’Eucharistie : il assistait chaque jour à la messe, passait de longs moments en adoration, se confessait chaque semaine et priait le chapelet. Ses amis se souvenaient de son esprit joyeux et serviable, toujours prêt à aider les plus pauvres. Il avait également une passion pour l’informatique, qu’il mit au service de l’évangélisation en créant un site internet recensant les miracles eucharistiques dans le monde.
Cette intuition visionnaire lui valut d’être surnommé le « cyber-apôtre de l’Eucharistie » ou encore « l’influenceur de Dieu ». Sa phrase la plus célèbre, « L’Eucharistie est mon autoroute vers le Ciel », résume sa spiritualité simple et profonde.
En 2006, Carlo mourut à l’âge de 15 ans d’une leucémie fulgurante. Son témoignage marqua ses proches et, peu à peu, sa réputation de sainteté se répandit bien au-delà de l’Italie. Béatifié à Assise en 2020, sa tombe attire désormais des milliers de pèlerins. Deux miracles ont été retenus pour sa canonisation. Le premier, au Brésil en 2013, concerna la guérison d’un enfant atteint d’une malformation congénitale du pancréas. Le second, reconnu par le pape François en 2024, fut la guérison de Valeria, une jeune Costaricienne victime d’un traumatisme crânien très grave après une chute de vélo. Sa mère pria sur la tombe de Carlo à Assise et la jeune femme recouvra rapidement la santé.La canonisation d’Acutis fut d’abord fixée au 27 avril 2025, dimanche de la Miséricorde divine, dans le cadre du Jubilé des Adolescents. Mais la mort du pape François, survenue quelques jours avant la cérémonie, entraîna sa suspension. Le Saint-Siège rappela alors que Carlo devait devenir le premier « millennial » canonisé, un signe fort adressé à la jeunesse du monde entier. L’élection du pape Léon XIV permit de reprogrammer la célébration, désormais fixée au 7 septembre 2025, et organisée conjointement avec celle de Pier Giorgio Frassati.
En canonisant ensemble ces deux figures, l’Église souligne la continuité et la diversité de la sainteté. Frassati incarne la joie du service, la radicalité de la charité et l’ancrage de la foi dans la société de son temps. Acutis révèle qu’aujourd’hui encore, dans une culture marquée par le numérique, il est possible de vivre l’Évangile pleinement, en unissant technologie et spiritualité. Tous deux rappellent que la sainteté n’est pas réservée aux religieux ou aux prêtres mais qu’elle peut fleurir dans la vie ordinaire d’un jeune étudiant ou d’un adolescent passionné d’informatique. Leur canonisation conjointe sera un signe puissant adressé aux jeunes du monde entier : la sainteté est un chemin accessible, un appel universel, et une invitation à s’élever « toujours plus haut ».