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Interview de l’évêque de Nice : il s’exprime sur l’aide aux migrants, l’IVG et les abus dans l’Eglise

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L'Église n'a pas pour mission de définir une politique migratoire. Elle se positionne envers des individus qui sollicitent notre aide, qui se retrouvent sans abri, et qui ont souvent traversé des expériences traumatisantes.

Nos confrères de Nice Matin ont interrogé Monseigneur Jean-Philippe Nault évêque du diocèse de Nice depuis un an et demi, le prélat revient sur la question de l’accueil des migrants mais également sur l’IVG et les abus sexuels dans l’Eglise.

Pourquoi l’Église tend-elle la main aux migrants alors que 80% des Français estiment, dans un sondage, qu’il ne faut pas en accueillir davantage?

L’Église n’a pas pour mission de définir une politique migratoire. Elle se positionne envers des individus qui sollicitent notre aide, qui se retrouvent sans abri, et qui ont souvent traversé des expériences traumatisantes.

En tant que chrétien, quel est mon devoir? Nous disposons de deux maisons à Carros, et par le biais d’une délégation au Département, nous offrons la possibilité d’accueillir de jeunes migrants. Dans le cadre de notre pastorale des migrants, nous sommes disponibles pour ceux qui se trouvent en situation d’urgence, mais aussi pour ceux qui sont présents depuis plus ou moins longtemps, qu’ils soient Cap-Verdiens, Philippins, Malgaches, Italiens, etc.

Vous mentionnez les migrations plus anciennes de chrétiens, alors que la majorité des migrants aujourd’hui sont musulmans…

Ce n’est pas nécessairement le cas, car il y a de nombreux chrétiens parmi eux, notamment en provenance du Soudan. L’Église s’engage à 100% dans son action envers les migrants tout en respectant pleinement les lois de la République.

L’inscription de l’IVG dans la Constitution et la perspective d’une nouvelle loi sur la fin de vie l’année prochaine : quelle est votre vision de ces évolutions législatives ?

Ces évolutions me préoccupent. L’embryon doit être traité avec le respect dû à une personne. En inscrivant l’avortement dans la Constitution, cela en fait un droit, alors que nous devrions privilégier la liberté de conscience des femmes et les accompagner dans leurs questionnements.

Nous défendons le respect de la vie depuis le commencement jusqu’à la fin, dans une perspective intégrale de la personne, comme le prône le pape. La loi actuelle sur la fin de vie nous semble suffisante, avec un renforcement des soins palliatifs, comme elle le suggérait. Il est essentiel de les développer considérablement, car nous disposons aujourd’hui de moyens plus importants qu’il y a quelques années pour atténuer la douleur et la souffrance.

Comment l’Église peut-elle avancer après avoir été entachée par de nombreuses révélations d’abus sexuels ?

Nous repartons humblement en mettant en place des mesures de prévention, d’accompagnement et de contrôle, afin d’éviter que de telles situations ne se reproduisent. C’est en prenant pleinement conscience de tous les abus, y compris non sexuels, que nous sommes en mesure d’apporter des changements et de progresser dans la vérité.

Comment pouvons-nous éviter que de tels abus ne se reproduisent ?

Il faut être vigilant à tous les niveaux. Par exemple, que je sois parent catéchiste, il est de ma responsabilité de surveiller mon propre comportement, ainsi que celui de ceux qui m’entourent. Nous ne pouvons pas fermer les yeux. Cette vigilance doit également s’appliquer dans le cadre du ministère sacerdotal, car des abus ont été commis lors de l’administration des sacrements, notamment pendant les confessions.

Cette question est traitée dans nos différentes formations, notamment dans un module d' »éducation affective, relationnelle et sexuelle » (EARS). J’ai également discuté de ce sujet avec tous les jeunes prêtres. Au sein du diocèse, nous travaillons actuellement à l’élaboration d’une charte sur ces questions. En quelque sorte, l’Église est en avance par rapport à la société dans ce domaine.

Comment abordez-vous les victimes de ces abus ?

Je continue de recevoir des personnes qui ont été victimes, même si ces événements sont anciens. Je n’étais pas là à l’époque, parfois je n’étais même pas encore né, mais j’assume la responsabilité des actions de l’Église. Les évêques de France ont mis en place une structure d’accompagnement appelée l’Inirr (Instance nationale indépendante de reconnaissance et de réparation) pour les personnes qui ont obtenu justice mais qui portent encore leurs propres cicatrices. L’Inirr offre un soutien en termes d’écoute, d’accompagnement psychologique, spirituel et financier.

Source Nice Matin

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