La Journée mondiale des malades de la lèpre, célébrée chaque année les 24, 25 et 26 janvier, est l’héritage d’un homme dont l’engagement a marqué le XXe siècle : Raoul Follereau. Chrétien, intellectuel et humanitaire infatigable, il a consacré sa vie à la lutte contre la lèpre, un fléau qui continue de défigurer des millions de vies à travers le monde. C’est en 1954 qu’il fonde cette journée, avec l’objectif de sensibiliser le monde entier à cette maladie, trop souvent ignorée, et de lutter contre la stigmatisation de ses victimes.
L’engagement d’un homme
Raoul Follereau aurait pu choisir une vie paisible, mais les orages du XXe siècle et sa foi profonde l’ont conduit à une existence de dévouement et d’action. Né à Nevers en 1903, il se forme comme écrivain et intellectuel engagé, membre de la génération des « non-conformistes des années trente ». Très jeune, il se forge une vision du monde où l’art et la culture doivent contribuer à la paix et à l’unité, un idéal qu’il met en pratique en fondant la Ligue d’union latine et en éditant des dizaines de publications. Cependant, sa vie prend un tournant décisif en 1942 lorsqu’il découvre les conditions de vie des lépreux en Côte d’Ivoire. Cette rencontre bouleversante le pousse à se consacrer entièrement à la lutte contre la lèpre.
Raoul Follereau, surnommé « Papa Raoul » par les malades, parcourt alors le monde entier, à 32 reprises, pour comprendre les réalités des lépreux et alerter les consciences. De ses voyages, il ramène des témoignages poignants et un appel à l’action : « Ils ne sont pas à côté du cimetière. Ils sont dedans… misérables et muets… » Il devient une figure emblématique de l’humanitaire, portant haut les valeurs de dignité et d’inclusion pour les malades. Sa démarche dépasse les simples soins médicaux et inclut un combat contre l’isolement social des lépreux, qu’il désire réintégrer dans la société.
Sa lutte ne s’arrête pas à la lèpre. Follereau se fait le porte-voix des injustices et souffrances humaines à travers le monde. Il milite pour la paix, la réconciliation et les droits de l’homme, appelant à une solidarité globale. En 1964, il lance une pétition mondiale pour consacrer un jour de guerre à la paix, soutenue par plus de trois millions de jeunes de 125 pays. Raoul Follereau incarne ainsi le rôle d’éveilleur de consciences et de défenseur des plus vulnérables.
Une maladie symbole de stigmatisation
La lèpre, connue depuis l’Antiquité, a longtemps été redoutée et mal comprise. Dans de nombreuses sociétés, elle a été perçue comme une malédiction divine ou une maladie héréditaire, entraînant une stigmatisation extrême de ceux qui en étaient atteints. Avant même la découverte de la cause biologique de la maladie, les lépreux étaient souvent rejetés, contraints à l’isolement dans des léproseries, loin de la société.
La lèpre serait originaire du sous-continent indien, avant de se propager en Europe à l’époque d’Alexandre le Grand et, plus tard, aux Amériques par la traite des esclaves. Bien que la compréhension de la lèpre ait évolué au fil des siècles, la stigmatisation des malades a persisté, renforcée par des croyances superstitieuses. Le bacille responsable de la lèpre, Mycobacterium leprae, a été découvert en 1873 par le médecin norvégien Hansen, marquant une avancée majeure dans la compréhension de la maladie. Cependant, les traitements efficaces se font attendre jusqu’au XXe siècle. Au début des années 1950, la Dapsone est introduite comme traitement de choix, mais la résistance bactérienne a rapidement limité son efficacité. Dans les années 1970, un traitement polychimiothérapeutique (PCT) a été mis au point, et en 1981, l’OMS a recommandé une combinaison de trois antibiotiques pour combattre la lèpre.
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La maladie, bien qu’elle puisse être soignée aujourd’hui, reste un problème de santé publique majeur dans certaines régions du monde, particulièrement dans les pays en développement. En 2018, 208 619 nouveaux cas ont été enregistrés à l’échelle mondiale, dont plus de 15 000 enfants. En dépit des progrès médicaux, la lèpre est toujours considérée comme une maladie négligée, et les personnes atteintes continuent de souffrir d’une exclusion sociale massive, une situation que les initiatives comme la Journée mondiale des malades de la lèpre cherchent à changer.
La Journée mondiale des malades de la lèpre et la Fondation
Cette journée est une occasion de rappeler à tous l’urgence de la situation et la nécessité de soutenir les personnes touchées par cette maladie. À travers les actions de la Fondation Raoul Follereau, créée par l’homme lui-même, cette cause continue de mobiliser les volontaires et de récolter des fonds pour des projets de soin, de réhabilitation et de sensibilisation.
En 2023, la Fondation a soutenu 278 projets dans 22 pays, en mobilisant une communauté de générosité composée de donateurs, partenaires et bénévoles. Environ 76% des fonds reçus sont directement affectés aux missions de terrain.
La Fondation intervient dans plusieurs domaines : des centres de soin pour les malades de la lèpre en Guinée forestière, des projets de recherche sur la lèpre et l’ulcère de Buruli, ainsi qu’un soutien humanitaire dans des régions en crise comme le Moyen-Orient. Grâce à un réseau de plus de 5 000 bénévoles et quêteurs, ainsi qu’à la fidélité de ses donateurs, la Fondation poursuit la mission de Raoul Follereau en apportant des solutions concrètes et durables aux plus vulnérables.
Aujourd’hui, la lutte contre la lèpre est loin d’être terminée. Chaque année, la Journée mondiale rappelle qu’il reste encore de nombreux défis à relever. Mais l’héritage de Raoul Follereau vit à travers les actions de ceux qui, comme lui, œuvrent sans relâche pour offrir aux malades de la lèpre une vie digne, libre de toute stigmatisation.
source raoul-follereau.org
