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[ Conclave ] La stratégie française : tous unis derrière le cardinal Aveline

Les cinq cardinaux français électeurs au conclave de 2025 le cardinal Jean-Marc Aveline ( au centre) , le cardinal Barbarin ( en haut à droite) le cardinal Dominique Mamberti ( en bas à gauche) , le cardinal  François-Xavier Bustillo ( en bas à droite) , et le cardinal Christophe Pierre ( en haut à gauche) .
Les cinq cardinaux français électeurs au conclave de 2025 le cardinal Jean-Marc Aveline ( au centre) , le cardinal Barbarin ( en haut à droite) le cardinal Dominique Mamberti ( en bas à gauche) , le cardinal François-Xavier Bustillo ( en bas à droite) , et le cardinal Christophe Pierre ( en haut à gauche) .
En se présentant comme un bloc uni, la France espère peser dans les premiers tours de scrutin, voire entraîner derrière elle d’autres cardinaux

Hier soir, à 21h02, une fumée noire s’est élevée de la chapelle Sixtine. Aucun cardinal n’a encore obtenu la majorité des deux tiers nécessaire pour être élu pape. Le conclave se poursuit dans un climat de discernement, mais aussi de stratégies visibles à travers les grandes lignes nationales. Et parmi celles-ci, la France se distingue par une rare unité : les cardinaux français avanceraient d’un seul pas en faveur du cardinal Jean-Marc Aveline, archevêque de Marseille.

C’est le quotidien italien La Stampa, qui met en lumière cette dynamique. Un constat qui contraste fortement avec la dispersion des voix dans les autres délégations, notamment en Italie, en Afrique ou en Amérique latine. Alors que les délégations cardinalices d’autres nations peinent à s’accorder, les cardinaux français auraient fait le choix de la cohésion autour de l’archevêque de Marseille.

Selon plusieurs observateurs, l’Église de France est l’une des premières à avoir affronté de plein fouet les défis de la sécularisation. C’est dans ce contexte que le cardinal Aveline aurait émergé comme un candidat crédible, non pas en dépit, mais à cause de l’environnement difficile dans lequel il exerce sa mission épiscopale. Originaire d’une famille de migrants espagnols, ancien professeur de théologie et recteur de l’Institut catholique de la Méditerranée, le cardinal Jean-Marc Aveline est décrit comme un pasteur enraciné, intellectuellement solide, et attentif aux réalités du monde moderne, notamment au pluralisme religieux et culturel. Son expérience à Marseille, ville frontière entre continents, traditions et religions, serait perçue comme un atout majeur pour diriger une Église mondiale en mutation.

Le contraste est donc marqué entre la clarté stratégique de la délégation française et les divisions persistantes ailleurs. En se présentant comme un bloc uni, la France espère peser dans les premiers tours de scrutin, voire entraîner derrière elle d’autres cardinaux sensibles à l’enjeu de la sécularisation et du témoignage chrétien dans des sociétés pluralistes.

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Le nom d’Aveline ne fait toutefois pas l’unanimité. Ses positions jugées proches de celles du pape François, notamment sur le dialogue interreligieux et l’accueil des migrants, suscitent de nombreuses réserves. Certains prélats s’interrogent sur sa capacité à affirmer clairement l’identité catholique dans un monde déstabilisé, et à gouverner une Église universelle marquée par des fractures internes. Le cardinal Aveline défend une théologie des religions qui relativise la mission unique de l’Église et redéfinit la foi comme un acte d’interprétation culturelle. Derrière un langage apparemment conciliant, sa pensée remet en cause le dogme catholique sur le salut et l’unicité du Christ. Certains y voient non un aggiornamento, mais un basculement vers un christianisme post-catholique.

Mais pour ses défenseurs, le cardinal de Marseille représente un équilibre : fidélité doctrinale, attention pastorale, profondeur théologique et expérience du réel. À leurs yeux, c’est ce type de profil qui peut incarner une Église fidèle à sa tradition tout en étant présente dans les périphéries humaines et spirituelles.

Dans les coulisses du Vatican, chacun sait que l’unité d’un petit groupe peut peser lourd dans les scrutins du conclave. Dans un contexte de fragmentation globale, le consensus autour d’Aveline pourrait en faire un nom de ralliement au fil des tours, si aucun favori évident ne s’impose dès le départ. La leçon française tient autant à la stratégie qu’au profil proposé. Reste à voir si cette cohésion saura convaincre au-delà des Alpes. Mais déjà, le cardinal Aveline est plus qu’un nom : il devient un signal, celui d’une Église qui recherche une certaine unité ..mais à quel prix ?

Les votes doivent reprendre aujourd’hui dans la chapelle Sixtine. Deux scrutins sont prévus ce matin, et selon la tradition, une nouvelle fumée pourrait s’élever vers midi. Sera-t-elle blanche ? Rien n’est encore joué. Mais dans les discussions silencieuses des murs du Vatican, la voix unie de la France pourrait compter davantage qu’on ne l’imagine.

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