Lors du Regina Caeli du dimanche 25 mai , le successeur de Pierre a évoqué sans détour les souffrances endurées par les fidèles sous les régimes marxistes, à commencer par le martyre d’un prêtre polonais tué par haine de la foi, avant d’adresser une pensée directe et appuyée aux catholiques de Chine, à l’occasion de la Journée de prière pour l’Église en Chine, instituée par Benoît XVI.
Voici les paroles du pape :
« Hier encore, à l’occasion de la commémoration liturgique de la Bienheureuse Vierge Marie Auxiliatrice, nous avons célébré l’Eucharistie. Journée de prière pour l’Église en Chine, instituée par le pape Benoît XVI. Dans les églises et les sanctuaires de Chine et du monde entier, des prières ont été adressées à Dieu en signe de sollicitude et d’affection pour les catholiques chinois et leur communion avec l’Église universelle. Que l’intercession de Marie la Très Sainte leur obtienne, ainsi qu’à nous, la grâce d’être des témoins forts et joyeux de l’Évangile, même au milieu des épreuves, afin que nous puissions toujours promouvoir la paix et l’harmonie. »
Une formulation diplomatique, certes, mais dont la juxtaposition avec le souvenir du père Stanislaus Kostka Streich, prêtre tué en 1938 pour avoir dérangé les partisans du communisme par son engagement au service des pauvres ,souligne un parallèle lourd de sens. Le pape évoque une Église opprimée, persécutée, restée fidèle, à qui l’on demande de témoigner de l’Évangile « au milieu des épreuves ». À bon entendeur.
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Ce propos n’est pas anodin. Il intervient dans un contexte où l’accord dit « provisoire » entre le Saint-Siège et la Chine, conclu en secret en 2018 sous le pontificat du pape François, reste sévèrement critiqué pour ses effets délétères. Dans les faits, cet accord a permis au Parti communiste chinois de renforcer son contrôle sur l’Église « officielle », au détriment de l’Église clandestine restée fidèle à Rome. Depuis, des évêques ont été imposés sans l’aval du pape, des prêtres ont été emprisonnés, et les enfants interdits d’accès aux églises.
Comme l’a rappelé récemment Nina Shea, directrice du Centre pour la liberté religieuse, les violations de la liberté de conscience en Chine sont telles que « les homélies doivent désormais inclure des citations du président Xi Jinping », pendant que « les prêtres sont surveillés et les enfants écartés des sacrements ». L’accord vaticano-chinois n’a pas mis fin à ces abus ; il les a couverts.
La prudence de Léon XIV dans ses mots contraste donc avec la clarté du contexte. Alors que les communistes ont nommé deux évêques dès le lendemain de la mort du pape François, le silence de Rome était devenu insoutenable pour de nombreux catholiques. L’intervention de dimanche laisse entrevoir un changement de cap. Non pas encore une rupture, mais un infléchissement.
Dans ce climat, une question brûle les lèvres de nombreux fidèles : le pape Léon XIV reviendra-t-il sur cet accord ? Osera-t-il poser les actes que les paroles laissent pressentir ?
La tradition catholique nous enseigne que l’Église ne pactise pas avec ceux qui persécutent ses enfants. Elle prie pour eux, elle les appelle à la conversion, mais elle ne négocie jamais la vérité ni ne sacrifie ses martyrs sur l’autel de la diplomatie.Pour le moment, Léon XIV semble vouloir marcher sur cette ligne étroite : parler avec fermeté sans rompre trop vite. Les mois à venir diront s’il choisit, comme il l’a lui-même formulé, « d’être un témoin fort et joyeux de l’Évangile, même au milieu des épreuves ».Que les catholiques de Chine sachent qu’ils ne sont plus seuls.