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Monseigneur Matthieu Rougé publie la lettre pastorale Verbum Christi : « Que la parole du Christ habite en vous dans toute sa richesse »

Monseigneur Matthieu Rougé - capture écran
Monseigneur Matthieu Rougé - capture écran
Le cœur de Verbum Christi réside dans l’appel à une lecture intégrale de la Bible sur quatre ans, dans une démarche appelée « randonnée biblique »

Dans un contexte marqué par un renouveau missionnaire, l’essor du catéchuménat, les défis numériques et sociaux, et les appels renouvelés du magistère, l’évêque de Nanterre invite les fidèles à faire de la Parole de Dieu une source vivante, capable de transformer les cœurs, de fortifier la communion et d’ouvrir un chemin de conversion durable.

La lettre pastorale Verbum Christi s’ouvre sur une dynamique de gratitude profondément enracinée dans la tradition biblique. Citant Colossiens 3, 15, Monseigneur Rougé enracine son appel dans l’action de grâce, en relisant les fruits spirituels et pastoraux vécus dans le diocèse : la vitalité des paroisses, la croissance du catéchuménat, les ordinations, les initiatives solidaires et les grands rassemblements diocésains. Il ne s’agit pas de dresser un bilan institutionnel, mais de discerner les signes de la présence du Ressuscité, « dont je bénis le Seigneur jour après jour de ce qu’il accomplit parmi nous ». Cette gratitude n’est pas un repos, mais un point de départ : l’évêque rappelle que « vivre dans l’action de grâce ne signifie pas se reposer sur ses lauriers », et cite l’exhortation paulinienne : « Faites de nouveaux progrès » (1 Th 4, 1).

Cette vision du progrès n’a rien d’activiste. Elle exprime une théologie de la croissance spirituelle. Les défis évoqués – accueil des catéchumènes, formation chrétienne, encouragement des vocations, attention aux nouvelles formes de pauvreté, discernement face à la révolution numérique – ne constituent pas une liste de tâches, mais l’expression d’une Église en conversion. Le choix du pape Léon XIV d’éclairer les enjeux numériques « comme Léon XIII l’a fait pour la révolution industrielle » inscrit ce discernement dans la longue tradition sociale de l’Église.

Le cœur de Verbum Christi réside dans l’appel à une lecture intégrale de la Bible sur quatre ans, dans une démarche appelée « randonnée biblique ». Monseigneur Rougé en montre la portée spirituelle en citant Colossiens 3, 16 : « Que la parole du Christ habite en vous dans toute sa richesse ».

Lire toute la Bible n’est pas un exercice académique, mais un chemin de transformation intérieure. Il souligne le risque contemporain du « zapping permanent », qui nuit à la capacité d’écoute, et rappelle avec saint Jérôme, cité par Dei Verbum, que « l’ignorance des Écritures, c’est l’ignorance du Christ ».

L’évêque n’ignore pas la difficulté de certains passages. Il reprend l’enseignement conciliaire selon lequel les livres de l’Ancien Testament, malgré certains aspects « caducs », portent une « véritable pédagogie divine » et contiennent des « trésors de prière » et « le mystère de notre salut ». Cette pédagogie s’inscrit dans une vision chrétienne de l’histoire : Dieu conduit son peuple à travers des étapes, des contradictions apparentes, des lenteurs parfois déconcertantes. Le parcours biblique proposé n’est donc pas linéaire, mais équilibré entre Ancien et Nouveau Testament, avec des introductions hebdomadaires et des relectures spirituelles destinées à guider les fidèles.La lettre prend ensuite une tonalité plus contemplative en expliquant que la Parole doit d’abord « habiter en nous ». La lecture quotidienne doit être une rencontre plus qu’un exercice. « La Sainte Écriture doit être lue et interprétée à la lumière du même Esprit que celui qui la fit rédiger », rappelle l’évêque.

Il invite les fidèles à commencer leur lecture par un moment de silence, à demander la grâce de recevoir la Parole comme adressée personnellement. Dans un monde saturé de sollicitations, cette insistance sur la prière comme acte premier de l’écoute biblique est particulièrement pertinente.

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L’évêque évoque les écoles d’oraison, les retraites, les lieux d’adoration, rappelant l’avertissement du Christ : « En dehors de moi, vous ne pouvez rien faire » (Jn 15, 5).Mais la Parole n’est pas seulement reçue individuellement : elle est portée et proposée par l’Église. Monseigneur Rougé insiste longuement sur la dimension communautaire et liturgique de l’écoute des Écritures. La proclamation de la Parole dans la messe, l’unité des « deux tables », la présence de l’évangéliaire dans les liturgies solennelles : tout cela rappelle que l’Église transmet la Parole comme un trésor vivant. Le diocèse est ainsi encouragé à vivre cette randonnée biblique dans les fraternités, les groupes paroissiaux, les parcours communautaires de Carême. Les prêtres, les équipes pastorales, les services diocésains sont invités à commencer leurs réunions par la lecture du passage du jour. La Bible n’est pas un livre isolé, mais une source de communion ecclésiale.

L’évêque développe ensuite la dimension missionnaire de cette immersion dans l’Écriture. Le « vous » de saint Paul ne s’adresse pas seulement aux croyants, mais à l’humanité appelée à devenir enfant de Dieu. Monseigneur Rougé encourage l’invitation large : proches, amis, personnes éloignées de l’Église, curieux, chercheurs de sens. Beaucoup de catéchumènes, écrit-il, ont été touchés par une lecture « inopinée » qui a bouleversé leur vie. L’évêque en tire une conviction profonde : la Parole a une force propre qui rejoint celui qui l’ouvre avec sincérité. Il évoque aussi la dimension œcuménique et interreligieuse de cette démarche, rappelant la proximité avec les orthodoxes, les communautés issues de la Réforme et la communauté juive du département. L’étude commune de l’Écriture devient un lieu de fraternité possible, humble et exigeant.La lettre poursuit en montrant comment la Parole fonde la foi, nourrit l’espérance et pousse à la charité. Dans un monde où les inquiétudes s’accumulent, l’évêque reprend la formule de saint Paul : « L’espérance ne déçoit pas » (Rm 5, 5), choisie par le pape François pour introduire le Jubilé 2025. La Parole éclaire le temps présent sans fuir ses défis : elle appelle à tenir, à discerner, à ne pas se laisser envahir par le découragement. L’évêque insiste également sur la force libératrice de la Parole pour les plus pauvres, rappelant l’épisode de la synagogue de Nazareth : « Il m’a envoyé porter la Bonne Nouvelle aux pauvres ». Il encourage la multiplication de groupes bibliques avec des personnes en précarité, convaincu qu’elles peuvent révéler la force des Psaumes, ces « cris de supplication et de foi » qui rejoignent l’expérience humaine dans ce qu’elle a de plus profond.

La dernière partie de la lettre, dédiée à Marie, donne à l’ensemble une coloration spirituelle forte. Marie apparaît comme la figure de la lectio divina : elle écoute, elle médite, elle garde dans son cœur.

L’évêque souligne sa présence au pied de la Croix, interprétée par saint Jean-Paul II, comme le sommet de la fidélité à la Parole : comprendre l’incompréhensible parce qu’on est enraciné dans l’écoute. Le Magnificat devient le modèle de la louange enracinée dans les Écritures, capable de relire l’histoire à la lumière de la promesse. En évoquant les sanctuaires marials du diocèse, l’évêque invite les fidèles à confier à Marie la fécondité de leur parcours biblique.


Verbum Christi ne se contente pas d’encourager une belle initiative : la lettre trace une orientation spirituelle de fond. Elle propose un retour aux sources, un recentrement sur la Parole, un chemin de conversion réaliste et exigeant. Dans un monde fragmenté où les voix se contredisent et où l’espérance s’effrite, l’appel de Monseigneur Rougé est comme une boussole : retrouver dans l’Écriture la lumière qui éclaire le pas suivant, la force qui soutient les cœurs, la vérité qui s’incarne dans la charité. Si le diocèse entre dans cette randonnée biblique avec foi et persévérance, alors pourra se vérifier cette parole essentielle citée par l’évêque : « Elle est vivante, la parole de Dieu, énergique et plus coupante qu’une épée à deux tranchants ». C’est ce chemin-là qui est proposé : un chemin où la Parole non seulement guide, mais transforme et envoie.

intégralité de la lettre pastorale Verbum Christi

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