Alors que de nouvelles révélations accablantes émergent sur les agissements de l’abbé Pierre, la Conférence des évêques de France, par la voix de son président, Mgr Éric de Moulins-Beaufort, demande l’ouverture d’une enquête judiciaire. Un tournant inédit dans cette affaire qui secoue l’Église et le mouvement Emmaüs.
Les révélations publiées cette semaine, notamment dans les enquêtes menées par Emmaüs et dans deux documentaires diffusés sur des chaînes nationales, jettent une lumière glaçante sur une réalité longtemps occultée. L’abbé Pierre, figure emblématique de la lutte contre la pauvreté et personnalité admirée bien au-delà des cercles catholiques, est désormais accusé d’agressions sexuelles sur des femmes, des enfants et des personnes en situation de précarité, sur une période s’étendant des années 1970 aux années 2000.
Face à la gravité des accusations, la Conférence des évêques de France affirme qu’il est indispensable que la justice se saisisse du dossier afin d’établir toute la vérité. Mgr Éric de Moulins-Beaufort a ainsi saisi le Procureur de la République de Paris pour non-dénonciation de viols et agressions sexuelles sur personnes vulnérables et mineurs, demandant que la lumière soit faite sur ces crimes présumés et sur les silences qui auraient pu les entourer.
La CEF souligne que seule la justice dispose des moyens d’investigation nécessaires pour établir avec rigueur la réalité des faits et examiner les éventuelles complicités ou non-dénonciations dont aurait pu bénéficier l’abbé Pierre.
La Conférence des évêques reconnaît que l’accumulation des témoignages bouleverse profondément l’Église et la société. Moulins-Beaufort affirme que la mise à disposition des archives par la CEF et la création d’une commission historique par Emmaüs ne suffisent pas à répondre aux attentes de vérité et de justice.
« Réaliser qu’il a utilisé son aura médiatique et l’œuvre sociale qu’il avait édifiée – suscitant, dans sa suite, l’engagement de tant de Français au service des plus pauvres – pour abuser sexuellement de femmes, d’enfants, et de personnes en situation de précarité, est effroyable », affirme la Conférence des évêques, qui exprime son immense peine aux victimes.
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Monseigneur Moulins-Beaufort insiste sur la nécessité pour l’Église d’adopter une posture d’écoute et de reconnaissance à l’égard des personnes abusées. Il encourage celles qui le souhaitent à se rapprocher des dispositifs d’écoute et d’accompagnement mis en place par l’Église et par Emmaüs.
La Conférence des évêques réaffirme sa détermination à ce que toute la vérité possible soit faite sur les crimes commis par l’abbé Pierre et les silences qui les ont entourés. Moulins-Beaufort déclare que l’Église est prête à coopérer pleinement avec la justice et à fournir tous les éléments en sa possession.
Dans les prochains jours, Mgr de Moulins-Beaufort devrait s’exprimer plus longuement alors que la pression s’intensifie sur l’Église pour qu’elle assume pleinement ses responsabilités dans cette affaire.
Dans ce contexte, la CEF insiste sur le fait que l’Église doit être une maison sûre et que son engagement dans la lutte contre les abus ne doit souffrir d’aucune ambiguïté. Elle exhorte toute personne ayant subi des violences sexuelles de la part de l’abbé Pierre à se manifester auprès des dispositifs d’écoute, soulignant que chaque témoignage est essentiel pour faire avancer la vérité.
Emmaüs a salué l’initiative de la CEF et poursuivra son travail de recueil de témoignages en lien avec les autorités judiciaires.
Alors que cette affaire bouleverse profondément l’image d’une figure longtemps intouchable, Moulins-Beaufort souligne que le chemin de la vérité et de la justice est désormais incontournable. L’enquête judiciaire permettra-t-elle de lever définitivement le voile sur cette page sombre de l’histoire de l’Église et du mouvement Emmaüs ?