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Affaire Becciu : la justice vaticane a-t-elle été piégée de l’intérieur ?

Cardinal  Becciu - DR
Cardinal Becciu - DR
Si ces révélations sont confirmées, l’affaire Becciu ne serait plus seulement celle d’un cardinal accusé de malversations, mais celle d’un procès faussé par des manœuvres internes, orchestrées par une personne déjà condamnée dans une autre affaire vaticane

En septembre 2020, le pape François écarte le cardinal Angelo Becciu de ses fonctions et le prive de ses droits liés au cardinalat, à la suite d’enquêtes internes sur des opérations financières suspectes de la Secrétairerie d’État, où le cardinal Becciu avait exercé comme substitut. L’affaire porte principalement sur l’achat controversé d’un immeuble de luxe à Londres pour environ 350 millions d’euros, transaction jugée opaque et coûteuse, financée en partie par des fonds destinés à des œuvres caritatives. Les investigations du tribunal du Vatican ont aussi relevé des transferts de fonds vers des structures liées à sa famille en Sardaigne. À titre de sanction disciplinaire, le cardinal Becciu a également été privé de sa participation au conclave qui a conduit à l’élection du pape Léon XIV. Il nie tout détournement, affirmant avoir agi avec l’approbation de ses supérieurs.

Le 22 septembre prochain, le Vatican rouvrira un dossier explosif, celui du cardinal Angelo Becciu, condamné en première instance pour fraude et détournement de fonds. Mais de nouveaux éléments, apparus grâce aux échanges privés entre Francesca Immacolata Chaouqui et Genoveffa Ciferri, viennent remettre en cause le cœur de l’accusation.

Ces messages, aujourd’hui aux mains des avocats de Raffaele Mincione, lui aussi condamné dans la même affaire, montrent que l’ex-membre de la commission Cosea pourrait avoir joué un rôle direct dans l’élaboration du fameux « mémoire Perlasca », pivot du dossier Becciu. La Bussola précise que ces éléments figurent désormais parmi les principaux motifs d’appel déposés devant le tribunal du Vatican.Au début de l’enquête, en avril 2020, Mgr Alberto Perlasca défendait vigoureusement son ancien supérieur, le cardinal Becciu, et décrivait leurs relations comme excellentes. Mais quelques mois plus tard, en août, il devenait soudain son accusateur principal. Entre ces deux dates, un fait crucial : Chaouqui, déjà condamnée dans le scandale Vatileaks 2, entre en contact avec une proche de Perlasca et lui suggère de pousser le prélat à « collaborer » avec les enquêteurs, tout en cachant son identité.

En juillet 2024 nous avions interviewé le cardinal Becciu qui dénonçait déjà un « plan diabolique » mené contre lui

Ce changement brutal d’attitude de Perlasca, associé aux messages où Chaouqui semble connaître à l’avance des informations confidentielles sur le calendrier des interrogatoires et sur la destitution imminente de Becciu, soulève une question majeure, le témoin central de l’affaire a-t-il été manipulé ?


Les échanges montrent que Chaouqui avait conçu un plan précis, fournir à Perlasca des questions rédigées pour le guider dans ses accusations, mais en les faisant passer pour l’œuvre d’un ancien magistrat. Lors du procès, Perlasca a fini par admettre qu’il avait reçu ces questions de Ciferri, qui les tenait elle-même de Chaouqui. Le Promoteur de justice a reconnu que cela pouvait constituer un motif de poursuite pour faux témoignage.Ce qui frappe, c’est la précision des « prédictions » de Chaouqui, dès début septembre 2020, elle annonce que le pape convoquera Becciu pour organiser sa sortie, ce qui se produira effectivement le 24 septembre.

Si ces révélations sont confirmées, l’affaire Becciu ne serait plus seulement celle d’un cardinal accusé de malversations, mais celle d’un procès faussé par des manœuvres internes, orchestrées par une personne déjà condamnée dans une autre affaire vaticane.Le cardinal Versaldi parle de « manœuvres subdoles » et appelle à « démasquer la falsification des preuves ». Le pape Léon XIV, quant à lui, insiste sur la nécessité d’une transparence totale dans la justice rendue « au nom de Sa Sainteté ».

L’Église ne peut se permettre que des procès d’une telle importance soient entachés de soupçons de manipulation. Ce n’est pas seulement l’honneur d’un cardinal qui est en jeu, mais la confiance des fidèles dans l’intégrité des institutions vaticanes.Si la justice a été instrumentalisée pour régler des comptes personnels, alors l’affaire Becciu pourrait devenir l’un des symboles les plus accablants d’une crise morale interne.

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