Ce matin, le Vatican a annoncé la mort du pape François, ouvrant la période de sede vacante et préparant l’Église universelle à un nouveau conclave. Alors que les préparatifs de ses funérailles débutent et que les cardinaux commencent à affluer vers Rome, un nom circule avec insistance : celui du cardinal Jean-Marc Aveline. Archevêque de Marseille depuis 2019 et récemment élu président de la Conférence des évêques de France, ce prélat français est présenté par plusieurs sources vaticanes comme l’un des favoris pour succéder à François.
Proche du pape défunt, attentif aux questions de dialogue interreligieux et de coexistence pacifique dans une société pluraliste, Mgr Aveline incarne une certaine continuité dans la ligne pastorale du pontificat précédent. Mais cette proximité suscite également des interrogations. Une enquête fouillée publiée par LifeSiteNews revient sur ses prises de position théologiques et soulève un certain nombre de critiques, en particulier quant à son approche du dogme et de la mission de l’Église.
Un portrait plus nuancé se dessine alors : celui d’un intellectuel affable, soucieux d’ouverture, mais dont la théologie pourrait marquer une inflexion significative par rapport à la tradition catholique.
Un langage théologique marqué par la problématisation
Dans ses écrits comme dans ses conférences, le cardinal Aveline adopte une méthode souvent qualifiée de « problématisante ». Il ne s’agit pas, pour lui, d’affirmer d’emblée des certitudes dogmatiques, mais d’ouvrir des pistes, de poser des questions et de croiser les regards théologiques, culturels et anthropologiques. Cette approche, qui séduit certains, inquiète d’autres, car elle semble parfois affaiblir la clarté doctrinale au profit d’une logique de recomposition.
LifeSiteNews observe ainsi que Mgr Aveline ne conteste pas frontalement les dogmes, mais tend à les relativiser dans une dynamique interprétative. C’est particulièrement vrai concernant la célèbre formule Extra Ecclesiam Nulla Salus — « Hors de l’Église, point de salut ». Le cardinal écrit :
« L’Église catholique reconnaît tout d’abord la possibilité d’un rôle positif des autres religions, en tant que réalités socio-culturelles, dans l’économie générale du salut. Cela exclut une position exclusiviste qui, au nom d’un ecclésiocentrisme étroit, refuserait aux religions non chrétiennes toute valeur salvatrice et révélatrice, en s’appuyant sur une interprétation durcie, et donc faussée, de l’antique adage patristique : “Hors de l’Église, point de salut.” »
Cette manière de présenter les choses reflète un désir d’inclure, de valoriser les autres traditions religieuses. Mais certains y voient un flou théologique qui pourrait brouiller le témoignage de l’Église sur la nécessité de la foi au Christ.
Une redéfinition de la foi
Un autre passage cité par LifeSiteNews souligne la volonté du cardinal Aveline de penser la foi en dialogue constant avec le monde et l’histoire. Il écrit :
« La foi est fondamentalement un acte d’interprétation, conjuguant une herméneutique de la Parole de Dieu et une herméneutique de l’existence humaine. »
Cette définition met l’accent sur l’expérience humaine dans l’acte de croire. Elle s’écarte cependant de la formulation classique de la foi comme assentiment surnaturel à la vérité révélée par Dieu. Pour certains théologiens critiques, cette conception risquerait de transformer la foi en simple lecture contextuelle, évolutive, au détriment de la dimension de vérité éternelle.
Une vision inclusive du salut
Le cardinal Aveline développe dans ses travaux une théologie du salut qui prend acte de la diversité religieuse de l’humanité. Il affirme notamment :
« Il est possible d’affirmer que dans les religions elles-mêmes sont déposées des “semences du Verbe”, des “rayons de la vérité qui éclaire tout homme”, et que “l’Esprit Saint offre à tous, d’une manière connue de Dieu, la possibilité d’être associé au mystère pascal.” »
Cette position, enracinée dans certains textes du concile Vatican II, n’est pas nouvelle en soi, mais sa récurrence dans l’enseignement de Mgr Aveline traduit une volonté de faire du pluralisme religieux une donnée structurante de la réflexion théologique. Là encore, les critiques de LifeSiteNews y voient moins une pastorale d’accueil qu’un véritable déplacement doctrinal.
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Le cardinal cite également Henri de Lubac pour souligner l’unité mystérieuse de l’humanité avec l’Église :
« Les “infidèles” doivent bénéficier à leur manière des échanges vitaux de ce corps [l’Église]. (…) Bien qu’ils ne soient pas eux-mêmes placés dans les conditions normales du salut, ils pourront néanmoins obtenir ce salut en vertu des liens mystérieux qui les unissent aux fidèles. »
Un changement de paradigme revendiqué
Enfin, le cardinal Aveline ne cache pas son ambition de voir émerger une nouvelle approche de la théologie. Il écrit :
« Un véritable changement de paradigme. (…) Il ne s’agit plus d’une théologie du salut des infidèles, mais d’une théologie des religions. »
Pour LifeSiteNews, cette déclaration marque un tournant : il ne s’agirait plus d’interroger la manière dont Dieu peut sauver hors de l’Église, mais d’élaborer une théologie à partir des religions elles-mêmes, avec leurs propres structures et significations. Cela représenterait, selon les auteurs de l’enquête, une rupture non seulement pastorale, mais théologique, avec le christianisme traditionnel.
Vers un conclave décisif
Dans les jours à venir, les cardinaux électeurs se réuniront à Rome pour élire le successeur de François. Le nom de Jean-Marc Aveline circule avec insistance, tant son profil intellectuel, sa proximité avec les orientations du dernier pontificat et son enracinement pastoral en Méditerranée parlent à une partie de l’Église.
Mais cette possibilité soulève aussi des interrogations : l’élection d’un pape français marquerait-elle un approfondissement du dialogue avec le monde moderne, ou un éloignement progressif de la doctrine catholique telle qu’elle a été reçue et enseignée depuis les origines ? La question reste ouverte.
Et si l’Église devait élire bientôt un pape français, il conviendra de bien discerner quel type de pape elle choisit : un héritier fidèle ou un réformateur audacieux ?