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Jean-Paul II et la natalité : une étude révèle l’impact de ses voyages en Amérique latine

Le 2 avril 2025 marquera le 20e anniversaire du décès de Jean-Paul II, un homme d’exception pour un destin d’exception

Une nouvelle étude menée par l’Université de Notre Dame (États-Unis) affirme que les messages de saint Jean-Paul II en faveur du mariage et de la famille, lors de ses 13 visites pastorales en Amérique latine entre 1979 et 1996, auraient entraîné une hausse notable de la natalité dans la région. Les chercheurs estiment que ces déplacements ont contribué à environ 220 000 à 251 000 naissances supplémentaires dans les années qui ont suivi les voyages.

Si l’augmentation de la fécondité n’était pas l’objectif explicite des visites du pape polonais, ses messages auraient renforcé les normes sociales et culturelles déjà présentes dans les pays concernés. L’étude, intitulée « Religion and Demography: Papal Influences on Fertility », met en lumière le rôle que peuvent jouer les valeurs religieuses dans les comportements démographiques, aux côtés des facteurs économiques ou culturels.

« Ces résultats indiquent que les gens écoutent réellement ce que le pape a à dire », explique Lakshmi Iyer, professeure d’économie à Notre Dame. « Et les sujets qu’il aborde comptent vraiment. »

Les effets mesurés ont été particulièrement significatifs dans des foyers non catholiques, aisés et très instruits, ainsi que dans les pays ayant connu une sécularisation récente. Ces données suggèrent que Jean-Paul II ne s’adressait pas seulement aux catholiques pratiquants, mais qu’il influençait plus largement la société.

Entre 1979 et 1996, Jean-Paul II a effectué 16 voyages à travers l’Amérique latine, proclamant à de nombreuses reprises qu’il s’agissait du « continent de l’espérance ». L’étude montre qu’au cours des deux à cinq années suivant ses visites, les taux de natalité ont augmenté de manière statistiquement significative dans les 13 pays analysés : Bolivie, Brésil, Colombie, République dominicaine, Équateur, Salvador, Guatemala, Haïti, Mexique, Nicaragua, Paraguay, Pérou et Trinité-et-Tobago. Le Salvador est le pays où l’effet mesuré est le plus marqué.

Ces résultats sont à mettre en perspective avec le recul global de la fécondité sur le continent, passée de 5,9 enfants par femme en 1960 à 2,2 en 2010. Les messages du pape en faveur de la vie familiale auraient ainsi temporairement contrebalancé cette tendance.

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Les chercheurs ont également observé une réponse différenciée selon les thèmes abordés. Lorsque Jean-Paul II prônait le soutien au mariage et s’opposait à l’avortement et à la contraception, les naissances augmentaient. En revanche, lorsqu’il insistait sur l’importance de la chasteté avant le mariage, les taux de naissance baissaient. Le public aurait donc réagi aussi bien aux encouragements qu’aux mises en garde.Pour Lakshmi Iyer, ces conclusions remettent en cause l’idée selon laquelle la démographie serait un phénomène incontrôlable : « C’est un produit des décisions personnelles, qui peuvent être influencées par un leadership inspirant. » Elle souligne que « le messager compte. Il faut quelqu’un capable de rappeler ce qui est important pour la culture. On peut changer les normes sociales si un leader dominant rappelle ce qui est considéré comme bon et acceptable au sein de la société. »

L’idée qu’un chef religieux puisse influencer la natalité n’est pas sans précédent. En Géorgie, le patriarche Ilia II avait proposé en 2008 de baptiser personnellement tout troisième enfant (et suivants) né dans un mariage religieux. Cette initiative, accompagnée de cérémonies de baptêmes collectifs, a contribué à faire repasser le pays au-dessus du seuil de renouvellement des générations.

L’étude de Notre Dame est cependant l’une des premières à établir un lien clair entre la figure papale et l’évolution des taux de natalité. Des recherches antérieures avaient donné des résultats plus nuancés : une étude de 2017 avait observé une baisse temporaire de la contraception après un voyage du pape Benoît XVI, entraînant une hausse passagère des naissances. En 2020, une étude sur l’Italie avait constaté une réduction des avortements attribuée aux discours papaux sur la famille, mais sans effet sur la natalité, suggérant un recours accru à la contraception.

Cette nouvelle analyse souligne donc l’impact concret que peut avoir une autorité morale et spirituelle comme celle de Jean-Paul II sur les décisions privées liées à la vie familiale, même dans des sociétés de plus en plus sécularisées : à homme d’exception, destin d’exception.

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