Dans son édition du dimanche 1er juin , le quotidien italien La Verità a publié un large extrait du discours d’ouverture prononcé à Rome par le cardinal Willem Jacobus Eijk, archevêque d’Utrecht, à l’occasion du troisième Congrès international de bioéthique organisé par la chaire Jérôme Lejeune. Ce prélat néerlandais, âgé de 71 ans, est également médecin et spécialiste en éthique médicale, ce qui confère un poids particulier à sa parole sur ces sujets.
Dès les premières phrases, le ton est donné. « Dans la culture séculière actuelle est à l’œuvre une conspiration contre la vie des faibles », affirme-t-il. Et de détailler les trois piliers de cette dérive culturelle : le scientisme, l’individualisme, et le dualisme anthropologique.
Selon le cardinal, « le scientisme affirme que seule la science peut fournir une connaissance réelle, tandis que la philosophie, la théologie et les autres disciplines ne produisent qu’une opinion ». Une position, souligne-t-il, qui se contredit elle-même, puisqu’elle n’est pas démontrable scientifiquement. Ce réductionnisme, dénonce-t-il, marginalise tout discours moral ou spirituel. « Ce qui reste hors du champ de la science serait donc sans valeur, y compris les vérités sur la nature humaine, sur la vie bonne, sur Dieu. »
Ce glissement a des conséquences concrètes : la valeur de la vie humaine n’est plus reconnue de manière intrinsèque, mais dépend de critères utilitaires comme le confort ou la rentabilité sociale. Ainsi, « ceux qui ne peuvent pas s’auto-soutenir » sont considérés comme « inutiles ».Le cardinal Eijk s’appuie alors sur les travaux du professeur Jérôme Lejeune, figure pionnière de la génétique moderne, pour rappeler que la science elle-même confirme l’intangibilité de la vie humaine dès la conception. « Le professeur Lejeune a montré avec une évidence implacable que la vie humaine commence dès la fécondation et possède, dès cet instant, une dignité intangible. »
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Vient ensuite la critique de l’individualisme, qu’il considère comme une conséquence directe de la sécularisation. « À partir des années 60, le bien-être croissant a permis l’idée que l’on pouvait vivre de manière autonome, indépendamment les uns des autres », explique-t-il. Ce culte de l’autosuffisance a mené à une société où « chacun fait ses propres choix, indépendamment de leur conséquence sur les autres ». Le citoyen devient ainsi « juge de ce qui est bon ou mauvais » pour lui-même, sans autre référence morale que son propre désir.
Cette logique individualiste est à la base de l’acceptation de l’euthanasie et du suicide assisté : « C’est l’individu lui-même qui décide s’il veut vivre ou mourir. »
Enfin, le cardinal s’en prend au dualisme anthropologique, cette idée selon laquelle le « moi » réside dans l’âme ou l’esprit, indépendamment du corps. « Le corps devient un simple objet manipulable », affirme-t-il, ouvrant la voie à des revendications comme le changement de sexe ou le droit à la mort choisie.
« Ceux qui promeuvent l’euthanasie, l’avortement ou l’identité de genre vont dans ce sens », déclare-t-il. La personne humaine est alors réduite à une conscience flottante, libre de disposer de son corps comme d’un bien de consommation. « Le sujet est pensé comme autonome, maître de lui-même, libre de se donner la mort. »Face à cette idéologie qui détruit silencieusement le respect dû à toute vie humaine, le cardinal Eijk en appelle à la vérité chrétienne, selon laquelle l’être humain, corps et âme, est créé à l’image de Dieu et possède une dignité inaliénable. Il met en garde : « Une société qui ne reconnaît pas cela est une société qui met en danger les plus faibles. »
Et de conclure par une parole forte du professeur Lejeune, toujours actuelle :
« Le plus grand malheur de l’humanité n’est pas d’être malade, mais de ne pas être aimé. »
Source : La Verità – Martina Pastorelli, 1er juin 2025.
Événement : Congrès international de bioéthique Jérôme Lejeune, Rome, 30-31 mai 2025.