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« La règle suprême dans l’Église est l’amour  » : le pape Léon XIV appelle à une Église humble et fraternelle

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« Ce n'est pas en affichant ses mérites que l'on se sauve, ni en cachant ses erreurs, mais en se présentant honnêtement, tels que nous sommes, devant Dieu »

En célébrant le Jubilé des équipes synodales et des organes de participation, le pape Léon XIV a livré une homélie profondément spirituelle, centrée sur le mystère de l’Église comme communion vivante et service fraternel. Le Saint-Père a voulu rappeler que la synodalité est avant tout une expérience spirituelle : marcher ensemble sous la conduite de l’Esprit, dans l’humilité et la charité.

La phrase clé de cette homélie, à la fois limpide et décisive, a résumé tout son message : « La règle suprême dans l’Église est l’amour : personne n’est appelé à commander, tous sont appelés à servir. » Par ces mots, Léon XIV situe la synodalité dans la continuité du lavement des pieds : l’autorité chrétienne n’est pas un privilège mais une vocation au service.

S’inspirant de la parabole du pharisien et du publicain, le pape a dénoncé la tentation de l’orgueil religieux, « lorsque le moi prime sur le nous » et que la communauté devient un lieu de comparaison et de pouvoir plutôt qu’un espace de fraternité. À l’inverse, c’est l’humilité du publicain qui devient le modèle du chrétien : se reconnaître pécheur, avoir besoin de Dieu et des autres, écouter et marcher ensemble.Le Saint-Père a aussi averti contre la dérive d’une Église autoréférentielle : « Nous devons rêver et construire une Église humble », a-t-il insisté, « une Église qui s’abaisse pour laver les pieds de l’humanité ».
Dans ce sens, la synodalité n’est pas un compromis institutionnel mais un chemin de conversion spirituelle : discerner ensemble, en se laissant transformer par l’Esprit.

Après cette célébration, lors de la prière de l’Angélus, le pape Léon XIV est revenu sur la même parabole de l’Évangile selon saint Luc (18, 9-14), approfondissant avec simplicité et clarté le contraste entre le pharisien et le publicain. Ce développement, plus pastoral, a prolongé le ton de l’homélie en l’appliquant à la vie quotidienne des fidèles.Le Saint-Père a montré que la vraie conversion commence par la vérité sur soi-même : « Ce n’est pas en affichant ses mérites que l’on se sauve, ni en cachant ses erreurs, mais en se présentant honnêtement, tels que nous sommes, devant Dieu. »
Cette parole rejoint l’appel de son homélie à l’humilité ecclésiale : ce que l’Église vit à l’échelle de ses institutions, chaque chrétien est appelé à le vivre personnellement dans sa relation avec Dieu.

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Léon XIV a aussi évoqué saint Augustin pour illustrer la différence entre l’orgueilleux et l’humble : l’un cache ses blessures par peur du jugement, l’autre les montre pour être guéri. Le pape a invité chacun à suivre cet exemple du publicain, à reconnaître ses fautes sans crainte, à les exposer devant la miséricorde du Seigneur.

Dans cette continuité, les deux interventions du Saint-Père – homélie et Angélus – forment un même message : seule une Église humble, consciente de sa dépendance envers la grâce, peut être un signe crédible de l’amour de Dieu dans le monde.

Intégralité de l’Homélie intégrale du pape Léon XIV

« Frères et sœurs,

en célébrant le Jubilé des équipes synodales et des organes de participation, nous sommes invités à contempler et à redécouvrir le mystère de l’Église, qui n’est pas une simple institution religieuse et ne s’identifie pas aux hiérarchies et à ses structures. L’Église, au contraire, comme nous l’a rappelé le Concile Vatican II, est le signe visible de l’union entre Dieu et l’humanité, de son projet de nous rassembler tous en une seule famille de frères et sœurs et de faire de nous son peuple : un peuple d’enfants aimés, tous liés dans l’étreinte unique de son amour.

En regardant le mystère de la communion ecclésiale, générée et gardée par le Saint-Esprit, nous pouvons également comprendre la signification des équipes synodales et des organes de participation ; ils expriment ce qui se passe dans l’Église, où les relations ne répondent pas à la logique du pouvoir mais à celle de l’amour. Les premières – pour rappeler un avertissement constant du Pape François – sont des logiques “mondaines”, tandis que dans la Communauté chrétienne, la primauté revient à la vie spirituelle, qui nous fait découvrir que nous sommes tous enfants de Dieu, frères entre nous, appelés à nous servir les uns les autres.

La règle suprême dans l’Église est l’amour : personne n’est appelé à commander, tous sont appelés à servir ; personne ne doit imposer ses idées, nous devons tous nous écouter mutuellement ; personne n’est exclu, nous sommes tous appelés à participer ; personne ne détient toute la vérité, nous devons tous la rechercher humblement, et la rechercher ensemble.

Le mot “ensemble” exprime précisément l’appel à la communion dans l’Église. Le Pape François nous l’a rappelé dans son dernier Message pour le Carême : « Marcher ensemble, être synodal, telle est la vocation de l’Église. Les chrétiens sont appelés à faire route ensemble, jamais comme des voyageurs solitaires. L’Esprit Saint nous pousse à sortir de nous-mêmes pour aller vers Dieu et vers nos frères et sœurs, et à ne jamais nous refermer sur nous-mêmes. Marcher ensemble c’est être des tisseurs d’unité à partir de notre commune dignité d’enfants de Dieu » (François, Message pour le Carême, 25 février 2025).

Marcher ensemble. C’est apparemment ce que font les deux personnages de la parabole que nous venons d’entendre dans l’Évangile. Le pharisien et le publicain montent tous deux au Temple pour prier, on pourrait dire qu’ils “montent ensemble” ou en tout cas qu’ils se retrouvent ensemble dans le lieu sacré ; pourtant, ils sont séparés et il n’y a aucune communication entre eux. Ils font tous deux le même chemin, mais ils ne marchent pas ensemble ; ils se retrouvent tous deux dans le Temple, mais l’un prend la première place et l’autre reste à la dernière ; ils prient tous les deux le Père, mais sans être frères et sans rien partager.

Cela dépend surtout de l’attitude du pharisien. Sa prière, en apparence adressée à Dieu, n’est qu’un miroir dans lequel il se regarde, se justifie, se loue lui-même. Il « était monté pour prier, mais il ne voulait pas prier Dieu, il voulait se louer lui-même » (Augustin, Discours 115,2), se sentant meilleur que l’autre, le jugeant avec mépris et le regardant de haut. Il est obsédé par son propre moi et, de cette manière, il finit par tourner sur lui-même sans avoir de relations ni avec Dieu ni avec les autres.

Frères et sœurs, cela peut aussi arriver dans la communauté chrétienne. Cela arrive lorsque le moi prime sur le nous, générant des individualismes qui empêchent les relations authentiques et fraternelles ; lorsque la prétention à être meilleur que les autres, comme le fait le pharisien avec le publicain, crée des divisions et transforme la communauté en un lieu de jugement et d’exclusion ; lorsque l’on utilise son propre rôle pour exercer un pouvoir et occuper des espaces.

C’est au publicain, au contraire, que nous devons nous référer. Avec son humilité, nous devons dans l’Église, reconnaître que nous avons besoin de Dieu et les uns des autres, en nous exerçant à l’amour mutuel, dans l’écoute réciproque, dans la joie de marcher ensemble, sachant que « le Christ appartient à ceux qui se sentent humbles, et non pas à ceux qui s’élèvent au-dessus du troupeau » (Saint Clément de Rome, Lettre aux Corinthiens, c. XVI).

Les équipes synodales et les organes de participation sont une image de cette Église qui vit dans la communion. Et aujourd’hui, je voudrais vous exhorter à l’écoute de l’Esprit, dans le dialogue, dans la fraternité et dans la parrhésie ; aidez-nous à comprendre que, dans l’Église, avant toute différence, nous sommes appelés à marcher ensemble à la recherche de Dieu pour nous revêtir des sentiments du Christ ; aidez-nous à élargir l’espace ecclésial afin qu’il devienne collégial et accueillant.

Cela nous aidera à vivre avec confiance et dans un esprit nouveau les tensions qui traversent la vie de l’Église – entre unité et diversité, tradition et nouveauté, autorité et participation –, en laissant l’Esprit les transformer afin qu’elles ne deviennent pas des oppositions idéologiques ni des polarisations nuisibles. Il ne s’agit pas de les résoudre en les réduisant, mais de les féconder par l’Esprit, afin qu’elles soient harmonisées et orientées vers un discernement commun.

En tant qu’équipes synodales et membres d’organes de participation, vous savez en effet que le discernement ecclésial exige « la liberté intérieure, l’humilité, la prière, la confiance réciproque, l’ouverture à la nouveauté et l’abandon à la volonté de Dieu. Il ne s’agit jamais d’affirmer un point de vue personnel ou de groupe, ni de la simple somme des opinions individuelles » (Document final, 26 octobre 2024, n° 82). Être une Église synodale c’est reconnaître que la vérité ne se possède pas mais qu’elle se recherche ensemble, en se laissant guider par un cœur inquiet et amoureux de l’Amour.

Chers amis, nous devons rêver et construire une Église humble. Une Église qui ne se tient pas droite comme le pharisien, triomphante et gonflée d’orgueil, mais qui s’abaisse pour laver les pieds de l’humanité ; une Église qui ne juge pas comme fait le pharisien avec le publicain, mais qui se fait lieu d’accueil pour tous et pour chacun ; une Église qui ne se referme pas sur elle-même, mais qui reste à l’écoute de Dieu pour pouvoir écouter tout le monde. Engageons-nous à construire une Église toute synodale, toute ministérielle, toute attirée par le Christ et donc tendue vers le service du monde.

Sur vous, sur nous tous, sur l’Église répandue dans le monde, j’invoque l’intercession de la Vierge Marie avec les paroles du Serviteur de Dieu Don Tonino Bello : « Sainte Marie, femme conviviale, nourris dans nos Églises l’élan de communion. […] Aide-les à surmonter les divisions internes. Interviens lorsque le démon de la discorde rampe en leur sein. Éteins les foyers des factions. Réconcilie les querelles réciproques. Apaises les rivalités. Arrête-les quand elles décident de se mettre à leur compte, oubliant la convergence sur des projets communs » (Maria, femme des jours de nos jours, Cinisello Balsamo 1993, 99).

Que le Seigneur nous accorde cette grâce : Être enracinés dans l’amour de Dieu pour vivre en communion les uns avec les autres. Être, en tant qu’Église, des témoins d’unité et d’amour. »

Texte intégral de l’Angélus du pape Léon XIV

« Chers frères et sœurs, bon dimanche !

Aujourd’hui, l’Évangile (cf. Lc 18, 9-14) nous présente deux personnages, un pharisien et un publicain, qui prient dans le Temple.

Le premier se vante d’une longue liste de mérites. Il accomplit de nombreuses bonnes œuvres et, pour cette raison, il se sent supérieur aux autres, qu’il juge avec mépris. Il se tient debout, la tête haute. Son attitude est clairement présomptueuse : elle reflète une observance stricte de la Loi, certes, mais pauvre en amour, faite de “donner” et “avoir”, de dettes et de crédits, dépourvue de miséricorde.

Le publicain prie lui aussi, mais d’une manière très différente. Il a beaucoup à se faire pardonner : il est percepteur au service de l’Empire romain et travaille avec un contrat de sous-traitance qui lui permet de spéculer sur les revenus au détriment de ses propres compatriotes. Pourtant, à la fin de la parabole, Jésus nous dit que c’est lui, parmi les deux, qui rentre chez lui “justifié”, c’est-à-dire pardonné et renouvelé par sa rencontre avec Dieu. Pourquoi ?

Tout d’abord, le publicain a le courage et l’humilité de se présenter devant Dieu. Il ne se renferme pas dans son monde, il ne se résigne pas au mal qu’il a fait. Il quitte les lieux où il est craint, en sécurité, protégé par le pouvoir qu’il exerce sur les autres. Il vient au Temple seul, sans escorte, même au prix de regards sévères et de jugements tranchants, et se présente devant le Seigneur, en retrait, la tête baissée, prononçant quelques mots : « Ô Dieu, aie pitié de moi, pécheur » (v. 13).

Jésus nous livre ainsi un message puissant : ce n’est pas en affichant ses mérites que l’on se sauve, ni en cachant ses erreurs, mais en se présentant honnêtement, tels que nous sommes, devant Dieu, devant nous-mêmes et devant les autres, en demandant pardon et en s’en remettant à la grâce du Seigneur.

Commentant cet épisode, saint Augustin compare le pharisien à un malade qui, par honte et orgueil, cache ses plaies au médecin, et le publicain à un autre qui, avec humilité et sagesse, expose ses blessures au médecin, aussi laides soient-elles, et demande de l’aide. Et il conclut : « Nous ne sommes pas surpris […] que ce publicain, qui n’a pas eu honte de montrer sa partie malade, soit reparti […] guéri » (Sermo 351,1).

Chers frères et sœurs, faisons de même. N’ayons pas peur de reconnaître nos erreurs, de les mettre à nu en en assumant la responsabilité et en les confiant à la miséricorde de Dieu. Ainsi pourra grandir, en nous et autour de nous, son Royaume, qui n’appartient pas aux orgueilleux, mais aux humbles, et qui se cultive, dans la prière et dans la vie, à travers l’honnêteté, le pardon et la gratitude. »

Source Vatican

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