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L’Abbaye d’Ourscamp ressuscitée ?

En 2022 , Une somme de 300 000 euros a été débloquée en urgence pour la préservation de l’abbatiale de Chiry-Ourscamp, grâce à l’initiative de la Mission patrimoine dirigée par Stéphane Bern. Cette contribution financière a été entièrement dédiée aux travaux d’urgence visant à restaurer le chœur de ce monument datant du XIIIe siècle.

L’histoire de l’abbaye

L’Abbaye Notre-Dame d’Ourscamp, située dans la commune de Chiry-Ourscamp, abrite la maison mère de la Congrégation des Serviteurs de Jésus et de Marie. Bien que cette congrégation soit relativement récente, remontant seulement de quelques décennies, l’abbaye elle-même a une histoire séculaire qui la place au cœur de la vie spirituelle depuis le 7e siècle.

Les Origines : Un Oratoire pour Saint Éloi

L’histoire de l’abbaye débute en l’an 641 lorsque Saint Éloi pose la première pierre d’un oratoire nommé Ourscamp, situé au bord de l’Oise, à environ 6 km au sud-ouest de Noyon et à 18 km au nord-ouest de Compiègne. L’abbaye tire son nom de cette origine incertaine, que l’on peut interpréter comme “le domaine de l’ours” ou “le champ de l’ours” en référence à une légende locale qui raconte qu’un ours aurait attaqué un bœuf utilisé pour transporter les pierres de construction de l’oratoire, mais aurait été maîtrisé miraculeusement par Saint Éloi.

Après la mort de Saint Éloi, l’oratoire attire des fidèles et une communauté monastique commence à se former. C’est en 1129 que l’abbaye prend véritablement son essor sous le nom de Notre Dame, fondée par Simon de Vermandois, évêque de Noyon. À cette époque, Saint Bernard installe douze moines sous la direction de Walerant de Beaudemont.

Deuxième Abbatiale au XIIIe Siècle

La première abbatiale est consacrée en 1131. Cependant, en 1154, une nouvelle abbatiale est construite sous la direction de Gilbert. Cette seconde église, achevée en 1201 et dédicacée par Étienne 1er, évêque de Noyon, mesurait 102 mètres de long, 24 mètres de large et avait une hauteur sous voûtes de 16 mètres. Elle était constituée de neuf travées et était couverte de voûtes en croisées d’ogives. Elle était remarquablement magnifique à l’intérieur, bien que l’extérieur reflétait l’austérité cistercienne avec un chevet plat et l’absence de clocher de pierre et de chapelles rayonnantes.

En 1254, les moines agrandissent l’église en y ajoutant une abside à chapelles rayonnantes, dont les ruines sont encore visibles aujourd’hui.

Pillage et Incendie pendant la Jacquerie

L’abbaye prospère et acquiert une réputation de sainteté sous la direction de Waleran de Baudemont et de ses moines. En 1358, cependant, pendant la Jacquerie, l’abbaye est pillée et partiellement incendiée par des aventuriers navarrais. Plusieurs religieux sont massacrés, et un grand nombre de biens sont emportés, provoquant un désastre dont l’abbaye peinera à se remettre.

L’abbaye survit malgré tout et en 1490, elle accueille une relique précieuse, le chef de Sainte Anne, rapporté de Hongrie après la défaite de Nicopolis. Cette relique restera en possession de l’abbaye jusqu’en 1807, lorsque le dernier prieur, Antoine-Nicolas Duverger, devient curé du village voisin, Chiry.

L’Époque de la Commende

Sous le règne de François Ier, un concordat permet de mettre en commende les biens des abbayes, ce qui signifie qu’ils peuvent être administrés par des séculiers, clercs ou laïcs. À partir de 1556, l’abbaye d’Ourscamp connaît une période de prospérité économique, mais le nombre de religieux diminue progressivement. En 1677, le prince Louis de Lorraine entreprend la réédification de la plupart des bâtiments conventuels, notamment la façade classique qui cache l’église gothique.

La Révolution et la Période Industrielle

En 1792, face aux lois révolutionnaires, les dix-huit derniers religieux quittent l’abbaye. Les bâtiments monastiques sont vendus à des démolisseurs pour une somme modique, et l’abbaye devient un hôpital militaire.

Sous l’Empire, l’abbaye change à nouveau de mains et devient une résidence de plaisance sous la propriété de Claude-Maximilien Radix de Sainte-Foy. Elle est transformée, et les deux églises abbatiales sont démolies. Les bâtiments sont réaménagés pour servir de résidence, tandis que la façade gothique de l’église est dissimulée par une colonnade dorique.

Dans les années qui suivent, l’abbaye entre dans une période industrielle qui dure près d’un siècle. Elle abrite des filatures, des fonderies de fer, et des entreprises textiles prospères. L’abbaye est dirigée par Achille Peigné-Delacourt, qui non seulement fait prospérer les activités économiques de l’abbaye, mais s’engage également dans l’archéologie et la préservation des ruines de l’abbaye.

La Première Guerre Mondiale

Pendant la Première Guerre mondiale en 1914, les troupes allemandes occupent les bâtiments de l’abbaye, qui devient une zone de combat. Les bombardements détruisent une partie des bâtiments, mais la grande façade classique des bâtiments de Gesvres et de Lorraine est préservée.

Restauration et Redécouverte Spirituelle

Après la guerre, l’abbaye connaît une période de restauration. Le marquis Robert de Flers, écrivain et académicien, acquiert les bâtiments et commence à les restaurer dans un esprit de préservation. Il dégage la façade classique de l’église abbatiale de la colonnade qui la dissimulait et la rend à la vue.

Dans les années 1970, l’abbaye reprend sa vocation religieuse lorsque la Congrégation des Serviteurs de Jésus et de Marie s’installe à Ourscamp. Cette congrégation, fondée en 1942, est dédiée à la spiritualité mariale et à l’adoration du Saint-Sacrement. Ils s’efforcent de redonner à l’abbaye sa vocation religieuse tout en préservant son histoire et ses ruines.

Aujourd’hui, l’Abbaye Notre-Dame d’Ourscamp est un lieu de prière, de retraite spirituelle, et un témoignage de l’histoire et de la foi qui l’ont façonnée au fil des siècles. Elle est ouverte aux visiteurs qui souhaitent découvrir son histoire, son architecture et sa dimension spirituelle.

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