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L’Académie Pontificale pour la Vie légitime-t-elle l’euthanasie et le suicide assisté ?

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Les critères économiques et relationnels mentionnés pour évaluer la proportionnalité des traitements renforcent cette impression, éloignant la réflexion éthique de sa base chrétienne.

La Pontificia Academia pro Vita (PAV), Académie pontificale pour la Vie, sous la direction de Monseigneur Vincenzo Paglia, a récemment publié un document controversé intitulé Petit lexique de la fin de vie. Ce livret, bien qu’édité par la Librairie Editrice Vaticane, soulève des questions profondes et inquiétantes quant à l’orientation de l’Académie vis-à-vis de l’euthanasie et du suicide assisté.

Le cœur du débat repose sur l’approbation des Directives anticipées de traitement (DAT). Ce document permet aux patients de refuser certains traitements à l’avance, en invoquant la crainte de l’acharnement thérapeutique.

Selon la PAV, “leur valeur ne peut être comprise dans un sens purement indicatif” (p. 36), soulignant ainsi leur caractère contraignant. Cette acceptation tacite ouvre la porte à des pratiques qui pourraient être interprétées comme favorisant l’euthanasie.

Monseigneur Vincenzo Paglia, président de l’Académie Pontificale pour la Vie – DR

La légitimité du refus des traitements vitaux

Le livret va plus loin en présentant un formulaire DAT où le patient peut refuser divers traitements vitaux comme les transfusions sanguines, la ventilation mécanique, la trachéotomie, l’hémodialyse, voire la réanimation cardio-pulmonaire (p. 79). De plus, il est précisé que la nutrition et l’hydratation assistées peuvent être interrompues, considérées comme potentiellement constituant un acharnement thérapeutique (p. 54 et 79).

Il est important de noter que ces décisions sont laissées à la discrétion subjective du patient, créant ainsi une dérive potentielle vers des pratiques euthanasiques.

La primauté du critère subjectif

L’académie semble privilégier le critère subjectif sur l’objectif, déclarant que “la décision appartient au malade” (p. 25) et que les traitements doivent correspondre “aux demandes du patient” (p. 48) et à “ses valeurs et exigences spirituelles” (p. 58). Cette approche subjective peut conduire à la légitimation de refus de traitements même lorsque ceux-ci sont cliniquement appropriés.

Comme mentionné dans le livret, “même s’ils étaient cliniquement appropriés, les traitements pourraient néanmoins s’avérer disproportionnés si la personne malade les jugeait trop lourds” (p. 64).

Vers une légitimation du suicide assisté?

L’aspect le plus troublant réside dans l’ouverture de l’académie à la légitimation du suicide assisté. Le livret suggère que “des médiations peuvent être admises sur le plan juridique dans une société pluraliste et démocratique” (p. 70), ce qui laisse entendre une acceptation morale du suicide assisté. Cela contredit directement la doctrine catholique, qui considère le suicide comme une action intrinsèquement mauvaise.

Ce positionnement de l’académie semble représenter une “certaine dérive”. En s’éloignant des principes fondamentaux de la dignité de la vie humaine, l’académie semble glisser vers une vision utilitariste, centrée sur la qualité de vie plutôt que sur sa sacralité.

Les critères économiques et relationnels mentionnés pour évaluer la proportionnalité des traitements (p. 63-64) renforcent cette impression, éloignant la réflexion éthique de sa base chrétienne.

Bien que l’Académie Pontificale pour la Vie tente de justifier ses positions par une adaptation aux réalités contemporaines, ne risque-t-elle pas de compromettre les fondements mêmes de l’éthique catholique ? N’est-il pas crucial de rappeler que la vie humaine, en toutes ses phases, reste sacrée et inviolable ? Comment pouvons-nous, en tant que catholiques, concilier les défis modernes avec les principes immuables de notre foi ?

La légitimation de l’euthanasie et du suicide assisté est-elle vraiment compatible avec la dignité humaine que nous sommes appelés à défendre ? Ne devons-nous pas fermement rejeter toute forme de légitimation de ces pratiques pour rester fidèles aux enseignements de l’Église ?

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L’académie pontificale pour la Vie

Fondée par le pape Jean-Paul II le 11 février 1994, l’Académie Pontificale pour la Vie,en italien Pontificia Accademia per la Vita ( PAV ) est une institution indépendante du Vatican. Créée par le motu proprio “Vitae Mysterium” (Du mystère de la vie), cette académie a vu le jour grâce à une collaboration étroite avec le généticien français Jérôme Lejeune, célèbre pour sa découverte du chromosome 21 supplémentaire de la trisomie 21 en 1958. Le professeur Lejeune, fervent défenseur de la vie dès sa conception jusqu’à sa fin naturelle, fut le premier président de l’Académie jusqu’à sa mort en 1994.

L’Académie Pontificale pour la Vie a pour mission de travailler en étroite collaboration avec le Conseil Pontifical pour la Pastorale des Services de la Santé. Son rôle est d’étudier, d’informer et de former sur les principaux problèmes biomédicaux et juridiques relatifs à la promotion et à la défense de la vie.

Ces études sont réalisées en lien avec la morale chrétienne et les directives du magistère de l’Église. L’Académie s’engage ainsi à promouvoir une culture de la vie, respectant la dignité humaine dans toutes ses phases, de la conception à la mort naturelle.

Le président de l’Académie, assisté d’un conseil collégial et d’un conseiller ecclésiastique, est chargé de convoquer l’Assemblée, de stimuler l’activité, d’approuver la programmation annuelle et de superviser l’administration conformément aux statuts. Les membres de l’Académie sont nommés par le pape et représentent diverses branches des sciences biomédicales, particulièrement celles liées à la promotion et à la défense de la vie humaine. L’assemblée plénière de l’Académie se réunit habituellement en février.

Depuis sa fondation, l’Académie a été dirigée par plusieurs éminents présidents : Jérôme Lejeune, généticien français; Juan de Dios Vial Correa, médecin chilien; Mgr Elio Sgreccia, prélat italien, assisté par Jean Laffitte, vice-président jusqu’en 2009; Mgr Rino Fisichella, évêque italien et recteur de l’Université pontificale du Latran; Mgr Ignacio Carrasco de Paula, évêque espagnol; et actuellement Mgr Vincenzo Paglia, évêque italien (source : article Wikipedia sur l’Académie Pontificale pour la Vie).

Le 4 mars 2023, l’Académie soutenait la position des évêques français contre l’idée d’un “droit” à mettre fin à une vie humaine, en affirmant qu’à l’ère des droits humains universels, une telle revendication ne pouvait exister (source : article Wikipedia sur l’Académie Pontificale pour la Vie).

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Avec Nbussola

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