Gestis verbisque ( Par des gestes et des mots) est une longue note de 11 pages publiée uniquement en italien par le préfet pour la Doctrine de la foi sur la validité des sacrements. Le cardinal Fernandez précise que face à la persistance d’abus liturgiques, la note Gestis verbisque souhaite réitérer que les paroles et les éléments établis dans le rite essentiel de chaque sacrement ne peuvent être altérés, car cela invaliderait le sacrement.
Le document publiée le samedi 3 février est un texte qui a été débattu lors de l’assemblée plénière récente du dicastère et approuvé par le Pape.
Il rappelle que les formules et les éléments matériels établis dans le rite essentiel du sacrement ne peuvent pas être modifiés à volonté au nom de la créativité. Une telle démarche invaliderait le sacrement.
Dans la présentation du document, le cardinal explique son origine, à savoir la « multiplication des situations où l’invalidité des sacrements célébrés avait été constatée », avec des altérations qui « avaient alors obligé à rechercher les personnes concernées pour répéter le rite du baptême ou de la confirmation, et un grand nombre de fidèles avaient légitimement exprimé leur mécontentement ».
Des modifications de la formule de baptême ont été citées en exemple :
« Je te baptise au nom du Créateur… » et « Au nom de ton père et de ta mère… nous te baptisons ».
Des circonstances qui ont également touché des prêtres qui, « ayant été baptisés avec de telles formules, ont douloureusement découvert l’invalidité de leur ordination et des sacrements célébrés jusqu’alors ».
Le cardinal explique que « si dans d’autres domaines de l’action pastorale de l’Église il y a place pour la créativité », dans le domaine de la célébration des sacrements, cela « se transforme plutôt en une ‘volonté manipulatrice' ».
Le préfet conclut en rappelant que « nous, ministres, devons surmonter la tentation de nous sentir propriétaires de l’Église » et que « les fidèles ont le droit, à leur tour, de les recevoir comme l’Église le prescrit ».
Priorité à l’action de Dieu « À travers des événements et des paroles étroitement liés », indique la note doctrinale, « Dieu révèle et accomplit Son dessein de salut pour chaque homme et chaque femme ». Malheureusement, « on doit constater que les célébrations liturgiques, en particulier celles des sacrements, ne respectent pas toujours pleinement les rituels prescrits par l’Église ».
Le document rappelle que « l’Église, depuis ses débuts, a accordé une attention particulière aux sources qui alimentent sa vitalité et son témoignage : la Parole de Dieu, attestée par les Saintes Écritures et la Tradition, et les Sacrements, célébrés dans la liturgie, par lesquels elle est constamment ramenée au mystère de la Pâque du Christ ».
C’est pourquoi les interventions du Magistère en matière de sacrements « ont toujours été motivées par la préoccupation fondamentale de la fidélité au mystère célébré. L’Église, en effet, a le devoir d’assurer la primauté de l’action de Dieu et de préserver l’unité du Corps du Christ dans ces actes qui sont sacrés par excellence et efficaces grâce à l’action sacerdotale du Christ ».
L’Église est également « consciente qu’administrer la grâce de Dieu ne signifie pas s’en approprier, mais devenir un instrument de l’Esprit pour transmettre le don du Christ pascal. Elle sait, en particulier, que sa potestas à l’égard des sacrements s’arrête face à leur substance » et que « dans les gestes sacramentels, elle doit conserver les gestes salvifiques que Jésus lui a confiés ».
La note explique ensuite que « la matière du sacrement consiste dans l’action humaine par laquelle le Christ agit. Elle comporte parfois un élément matériel (eau, pain, vin, huile), parfois un geste particulièrement significatif (signe de croix, imposition des mains, immersion, consentement, onction) »; une corporeité « essentielle car elle enracine le sacrement non seulement dans l’histoire humaine, mais aussi, de manière plus fondamentale, dans l’ordre symbolique de la Création et le ramène au mystère de l’Incarnation du Verbe et de la Rédemption opérée par Lui ».
Quant à la forme du sacrement, elle « est constituée par la parole, qui donne à la matière un sens transcendant, transfigurant le sens ordinaire de l’élément matériel et le sens purement humain de l’action accomplie. Cette parole s’inspire toujours, à différents degrés, de la Sainte Écriture, s’enracine dans la Tradition vivante de l’Église et a été définie avec autorité par le Magistère de l’Église ». Par conséquent, la matière et la forme « n’ont jamais dépendu et ne peuvent jamais dépendre de la volonté individuelle ou d’une communauté ».
Le document réaffirme que « pour tous les sacrements, dans tous les cas, l’observation de la matière et de la forme a toujours été nécessaire pour la validité de la célébration,
sachant que les changements arbitraires de l’une et/ou de l’autre – dont la gravité et l’impact invalidant doivent être évalués périodiquement – compromettent l’efficacité de l’octroi de la grâce sacramentelle, au détriment évident des fidèles ». Ce qui est écrit dans les livres liturgiques promulgués doit être fidèlement suivi sans « ajouts, retraits ou modifications ». Car si les paroles ou la matière sont modifiées, le sacrement n’existe plus.
À cet égard, la note numéro 34 du document fait une distinction importante entre la licéité et la validité, expliquant que « toute modification de la formule d’un sacrement est toujours un acte gravement illicite », même s’il s’agit de quelque chose de mineur qui n’altère pas son sens original et ne le rend pas invalide.
La modification des éléments essentiels à la célébration du sacrement introduit également « un doute sur l’intention réelle du ministre, compromettant définitivement la validité du sacrement célébré ».
La liturgie permet la diversité qui préserve l’Église de l’uniformité rigide, comme indiqué dans la Constitution conciliaire Sacrosanctum Concilium. Cependant, cette diversité et cette créativité, qui favorisent une meilleure compréhension du rite et la participation active des fidèles, ne peuvent pas affecter ce qui est essentiel dans la célébration des sacrements. « Il est donc de plus en plus urgent, affirme la note, de développer un art de célébrer qui, loin du formalisme strict et de l’imagination débridée, conduise à une discipline à respecter, précisément pour être de vrais disciples ».
Le texte reprend cette citation du Pape : « Il ne s’agit pas de suivre un manuel de bonnes manières liturgiques. Il s’agit plutôt d’une « discipline » – au sens entendu par Guardini – qui, si elle est observée, nous forme authentiquement. Ce sont des gestes et des paroles qui ordonnent notre monde intérieur en nous faisant vivre certains sentiments, attitudes et comportements. Ils ne sont pas une explication d’un idéal que nous cherchons à suivre, mais ils sont une action qui engage tout notre être, c’est-à-dire notre unité de corps et d’âme » (Lettre apostolique Desiderio desideravi).
« Nous portons ce trésor dans des vases d’argile, pour que l’excellence du pouvoir soit de Dieu et non de nous » (2 Co 4,7).
En conclusion, le document du dicastère pour la Doctrine de la foi cite les paroles de saint Paul, une antithèse utilisée « pour souligner comment la grandeur du pouvoir de Dieu se manifeste à travers la faiblesse de Son ministère d’annonce, ce qui décrit également ce qui se passe dans les sacrements. Toute l’Église est appelée à préserver la richesse qu’ils renferment, afin que la primauté de l’action salvatrice de Dieu dans l’histoire ne soit jamais obscurcie, même dans la médiation fragile des signes et des gestes propres à la nature humaine ».
Source Vatican News