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« Les civils souffrent, pris entre deux armées » : au Myanmar, l’Église témoigne d’une foi qui résiste

Une maison détruite par la junte à Minbya - DR
Une maison détruite par la junte à Minbya - DR
Dans ce chaos, l’évêque de Pyay, Mgr Peter Tin Wai, dénonce la souffrance des civils et affirme que, malgré tout, la foi reste vivante

L’État de Rakhine, situé à l’ouest du Myanmar, est devenu l’un des foyers les plus violents de la guerre civile qui ravage le pays depuis le coup d’État militaire de février 2021. Ici, l’armée régulière affronte l’Arakan Army (AA), une formation ethnique qui contrôle aujourd’hui 14 des 17 municipalités. Privés de repères et de stabilité, les civils se retrouvent au milieu d’un conflit dont ils paient le prix le plus lourd.Le 12 septembre dernier, un bombardement aérien a frappé deux écoles privées à Kyauktaw, tuant 20 jeunes âgés de 15 à 21 ans. UNICEF a dénoncé un « schéma de violence de plus en plus dévastateur », rappelant que ce sont « les enfants et les familles qui paient le prix le plus élevé ».

Monseigneur Peter Tin Wai, évêque de Pyay, dont le diocèse couvre presque tout le Rakhine, décrit une situation dramatique : « Dans la plupart de l’État, le pouvoir est désormais aux mains de l’Arakan Army. Les communications sont coupées, l’éducation est paralysée et les populations ne font qu’essayer de survivre », confie-t-il à l’agence Fides.Pourtant, la mission de l’Église se poursuit. « Nous avons 12 paroisses qui continuent leur mission. Les prêtres restent proches du peuple, célèbrent les sacrements et maintiennent les églises ouvertes au cœur de la souffrance », précise-t-il. Sur les quelque 30 000 fidèles du diocèse, environ la moitié vit en zone contrôlée par l’AA, l’autre moitié dans les trois municipalités encore aux mains de l’armée (Sittwe, Kyaukpyu et Munaung).

Monseigneur Peter Tin Wai, évêque de Pyay

La guerre ne se limite pas aux bombardements. Elle sape aussi l’avenir du pays. Les deux forces imposent la conscription, forçant les jeunes à s’engager dans le combat. « Tous nos jeunes fuient à l’étranger, et la société perd ses meilleures forces vives », alerte l’évêque.

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Ce climat de violence entraîne des déplacements massifs. Des familles entières quittent le Rakhine pour rejoindre Pyay ou Yangon, à la recherche de sécurité. La région souffre de pénuries de riz, de l’absence d’accès aux soins et d’un effondrement du système éducatif. « Les familles tentent de se rapprocher des zones où les services essentiels, comme les écoles, fonctionnent encore », explique Monseigneur Tin Wai.Dans ce contexte de guerre et de privations, l’Église demeure un point d’appui spirituel et humain. « Les prêtres et religieux, avec leurs moyens limités, tentent de rester proches des populations et de réconforter les affligés. La foi est vivante malgré la guerre. Dans la souffrance, les gens se tournent vers Dieu avec encore plus d’intensité », affirme l’évêque.

Il rappelle enfin l’urgence d’un dialogue national : « Dans cette guerre civile qui ravage la nation, personne ne peut gagner. Tous sont perdants. Chaque jour est un don de Dieu, et nous prions pour que cesse cette épreuve. L’Église, dans l’angoisse, continue de prêcher la paix et l’espérance. » Le témoignage de Mgr Tin Wai souligne la dure réalité d’un peuple oublié, pris au piège entre deux armées. Mais il révèle aussi la force d’une foi qui, au cœur du chaos, demeure un signe d’espérance et un appel pressant à la paix.

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