Depuis 2000 ans

Les indulgences : un cadeau précieux trop délaissé

Ouverture de  la Porte Sainte de la basilique Saint-Pierre - DR
Ouverture de la Porte Sainte de la basilique Saint-Pierre - DR
L’indulgence est la rémission devant Dieu de la peine temporelle due pour les péchés dont la faute est déjà effacée, rémission que le fidèle bien disposé obtient à certaines conditions déterminées

Par Anne-Marie Michel

Nous vivons depuis le 24 décembre 2024 et jusqu’au 6 janvier 2026 la grâce d’une année jubilaire. À cette occasion, la Pénitencerie Apostolique a publié une « note sur l’indulgence plénière concédée durant le jubilé ordinaire de l’année 2025 annoncé par sa sainteté le pape François[1] ».

Nous sommes appelés à vivre en pèlerins de la vertu théologale d’Espérance[2]. « L’espérance est la vertu théologale par laquelle nous désirons comme notre bonheur le Royaume des cieux et la Vie éternelle, en mettant notre confiance dans les promesses du Christ et en prenant appui, non sur nos forces, mais sur le secours de la grâce du Saint-Esprit », explique le Catéchisme de l’Église Catholique (paragraphe 1817). Notre espérance est donc fondée sur notre désir d’entrer – dès ici-bas – dans le Royaume de Dieu et d’y être introduit définitivement pour la vie éternelle. Mais l’entrée est-elle sans condition, comme dans un moulin ouvert à tout vent ?

Selon le chanteur pop aux lunettes blanches, bien connu pour être un grand théologien devant l’Éternel, « on ira tous au paradis » : les bonnes sœurs et les voleurs, les brebis et les bandits, les bénis et les maudits, les saints et les assassins, qu’on croit ou pas, que l’on ait pratiqué le bien ou le mal… « On sera tous invités au bal », chante-t-il, exprimant ainsi une secrète espérance inscrite au fond de la conscience de tout être humain. Il a raison : nous sommes tous invités, effectivement.

Et nous aurons certainement des surprises en arrivant là-haut, car l’enfer est pavé de bonnes intentions et le paradis peuplé de pharisiens et de prostituées… Le salut est offert à tous, l’espérance vaut pour tout homme. Qui plus que Dieu veut le salut pour l’humanité entière ?

Mais, n’en déplaise à Polnareff, l’Évangile doit être lu en entier : en Matthieu, 22 10-14, on comprend qu’il y a des conditions à l’admission dans la salle des noces : « Les serviteurs allèrent sur les chemins, rassemblèrent tous ceux qu’ils trouvèrent, les mauvais comme les bons, et la salle de noce fut remplie de convives. Le roi entra pour examiner les convives, et là il vit un homme qui ne portait pas le vêtement de noce. Il lui dit : “Mon ami, comment es-tu entré ici, sans avoir le vêtement de noce ?” L’autre garda le silence. Alors le roi dit aux serviteurs : “Jetez-le, pieds et poings liés, dans les ténèbres du dehors ; là, il y aura des pleurs et des grincements de dents.” Car beaucoup sont appelés, mais peu sont élus. »

Pour voir un jour notre espérance comblée en étant éternellement admis en la compagnie du Roi des rois, il faut donc être revêtu du vêtement de noce. Un excellent moyen de s’en revêtir est la pratique de la confession tout en redécouvrant en quoi consistent les indulgences. Nous sommes ainsi conviés à plonger dans l’abîme de la miséricorde de Dieu.

Le paragraphe 1471 du CEC précise :

« La doctrine et la pratique des indulgences dans l’Église sont étroitement liées aux effets du sacrement de Pénitence. L’indulgence est la rémission devant Dieu de la peine temporelle due pour les péchés dont la faute est déjà effacée, rémission que le fidèle bien disposé obtient à certaines conditions déterminées, par l’action de l’Église, laquelle, en tant que dispensatrice de la rédemption, distribue et applique par son autorité le trésor des satisfactions du Christ et des saints  » (Paul VI, const. ap.  » Indulgentiarum doctrina « , Norme 1). »

Nos péchés, même véniels, souillent notre âme qui appelle alors à être purifiée car nous ne saurions paraître devant Dieu encore souillés. C’est cette nécessaire purification qui nous libère de la peine temporelle du péché. (CEC 1472). Pourtant, la remise des peines peut déjà être effective dans la confession, mais hélas, notre manque de ferveur à l’occasion de ce sacrement, une pénitence trop faible ou vécue sans élan spirituel par le pénitent amenuisent beaucoup cette remise de peine.

Celle-ci, par ailleurs, « ne concerne que les péchés qui ont été remis par la contrition et absous par l’absolution sacramentelle du prêtre.[3] » Les indulgences sont là pour nous redonner le courage et la force nécessaires à l’obtention de cette remise de peine. La miséricorde de Dieu est infinie, ce qui n’entame pas la nécessaire exigence de sa justice.

Ainsi, pour gagner ces indulgences, il faut remplir certaines conditions. Le Seigneur à travers l’Église nous demande quand-même un effort, une participation active à l’œuvre de notre salut. La note de la Pénitencerie Apostolique sur l’indulgence plénière concédée durant le jubilé ordinaire de l’année 2025 les explicite. Elle « entend susciter et faire grandir dans les âmes des fidèles le désir d’obtenir l’Indulgence comme le don de grâce propre à chaque Année Sainte. »

Lira aussi

Saint Paul VI dans la Constitution Apostolique « Indulgentiarum doctrina[4] » explique les fondements des indulgences sur la base de l’Écriture et la tradition. Il y établit également les conditions plus pratiques pour leur obtention :

« Pour obtenir l’indulgence plénière il est nécessaire d’accomplir l’œuvre à laquelle est attachée l’indulgence et de remplir trois conditions : la confession sacramentelle, la communion eucharistique et la prière selon les intentions du Souverain Pontife. Il faut de plus que soit exclu tout attachement au péché, même véniel. Si cette pleine disposition vient à manquer, ou si les trois susdites conditions ne sont pas remplies, l’indulgence sera seulement partielle. »

Dans le cadre de cette année jubilaire, l’indulgence est accordée :

  • au cours d’un pèlerinage en tout lieu lié au Jubilé en y participant pieusement à la messe ou à une prière liturgique,
  • au cours d’une visite à un lieu jubilaire. « Là, ils vivront un temps convenable d’adoration eucharistique et de méditation, conclu par le Notre Père, le Credo, et l’invocation à Marie, Mère de Dieu. »

Les lieux jubilaires sont principalement à Rome et en Terre Sainte, mais chaque diocèse établit ses lieux jubilaires propres.La note précise aussi comment les personnes qui ne peuvent légitiment se déplacer (religieuses, infirmes, prisonniers) pourront obtenir cette indulgence.

Les œuvres de miséricorde et de pénitence sont également le terreau particulièrement favorable à l’obtention de l’indulgence. Il s’agit des « œuvres de miséricorde corporelles : donner à manger aux affamés, donner à boire à ceux qui ont soif, vêtir ceux qui sont nus, accueillir les étrangers, assister les malades, visiter les prisonniers, ensevelir les morts, […] ainsi que les œuvres de miséricorde spirituelles : conseiller ceux qui sont dans le doute, enseigner les ignorants, avertir les pécheurs, consoler les affligés, pardonner les offenses, supporter patiemment les personnes ennuyeuses, prier Dieu pour les vivants et pour les morts. »

L’accent est mis sur l’esprit de la démarche qui reste une action de « pénitence qui est comme l’âme du Jubilé. »

L’indulgence est un immense cadeau de l’amour infini du Père, mais il semble délaissé actuellement. Ce Jubilé est l’occasion précieuse de le redécouvrir, comme expression de la communion des saints dans la miséricorde de Dieu. Car les indulgences peuvent être obtenues pour soi-même ou pour une âme défunte. Une grande grâce !


[1] https://www.vatican.va/roman_curia/tribunals/apost_penit/documents/rc_penitenzieria-ap_20240513_norme-indulgenza-giubileo2025_fr.html

[2] https://www.vatican.va/content/francesco/fr/bulls/documents/20240509_spes-non-confundit_bolla-giubileo2025.html

[3] Père Divry, op, Aleteia.

[4] Constitution apostolique Indulgentiarum doctrina

Recevez chaque jour notre newsletter !