Lors du dernier Synode , une question importante semble avoir été laissée dans l’ombre : celle des catholiques attachés à la liturgie traditionnelle. Pourquoi ces fidèles, qui constituent une part croissante de l’Église, n’ont-ils pas été entendus ? Pourquoi leurs contributions, pourtant bien documentées, ont-elles été écartées des débats ? Le traitement réservé à ce groupe, déjà fragilisé par les restrictions imposées par Traditionis Custodes en 2021, soulève des interrogations sur la véritable portée de ce Synode, censé incarner une Église à l’écoute de tous.
Les catholiques traditionnels ont, depuis plusieurs années, formé une communauté dynamique, dont la vitalité se manifeste notamment par une augmentation significative des vocations et une fréquentation grandissante des liturgies en latin. Mais au Synode, ces voix ont été comme invisibles. Tandis que des thèmes comme la crise des vocations et la pénurie de prêtres étaient largement débattus, la liturgie traditionnelle, loin de constituer une solution à cette crise, a été presque totalement ignorée. Comment expliquer ce silence ?
Aci précise que Lles appels des groupes traditionnalistes, tels que la Société des Messes Latines de Grande-Bretagne (LMS) ou la Fédération Internationale Una Voce (FIUV), qui ont encouragé leurs membres à participer et à soumettre des contributions, sont restés lettre morte. Loin d’être intégrées dans le processus synodal, leurs observations ont été marginalisées, comme des voix étouffées dans le bruit des discussions sur la synodalité. Pourtant, ces fidèles ont bien souligné les fruits positifs de la messe traditionnelle : une forte croissance des vocations, des conversions et un renouveau de la vie chrétienne.
Pourquoi un tel rejet ?
Il semble que le motu proprio Traditionis Custodes, émis par le Pape François en 2021, ait jeté une ombre sur toute discussion relative à la messe traditionnelle. L’objectif affiché de ce document était de limiter la célébration de la liturgie ancienne, au nom de l’unité de l’Église. Mais cet appel à l’unité n’a-t-il pas, paradoxalement, entraîné la marginalisation de ceux qui se sentent profondément attachés à la tradition liturgique de l’Église ? Les catholiques traditionnels sont-ils devenus les boucs émissaires d’un désir de « modernisation » qui ignore leur identité et leurs besoins spirituels ?
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Les propos du Cardinal Jean-Claude Hollerich, rapporteur général du Synode, sont révélateurs de cette distorsion. En réponse aux questions sur l’absence de la messe traditionnelle dans les débats du Synode, il a simplement affirmé que ce n’était « pas un sujet de discussion ». Or, un Synode qui se veut synodal, c’est-à-dire ouvert à l’écoute de tous, devrait inclure toutes les voix, y compris celles des traditionnalistes. À moins que, comme le suggère l’abbé Claude Barthe, l’exclusion des traditionnalistes soit avant tout « idéologique », une volonté délibérée de ne pas reconnaître leur place dans le paysage ecclésial actuel.
L’une des raisons possibles de cette exclusion réside dans la vision dominante qui assimile souvent la liturgie traditionnelle à un obstacle à la modernité. Pourtant, dans de nombreuses communautés traditionnelles, on constate un dynamisme qui pourrait bien offrir des solutions aux défis actuels de l’Église : des vocations nombreuses, des communautés engagées et une fidélité inébranlable aux enseignements de l’Église. Au lieu d’être perçus comme un groupe en retrait, ces catholiques pourraient apporter une contribution précieuse au renouvellement de l’Église, si tant est qu’on leur accorde une place dans le dialogue synodal.
La question reste donc posée : pourquoi ce rejet des traditionnalistes ? Est-ce une véritable volonté de les exclure du processus de renouvellement de l’Église, ou est-ce simplement une incompréhension de ce qu’ils peuvent apporter à la vie ecclésiale ? À l’heure où l’Église se débat avec une crise de vocations et une remise en question de son autorité, il serait peut-être sage de tendre l’oreille à ces voix qui, loin de se marginaliser, cherchent à témoigner de la richesse de la Tradition, pour le bien de tous les fidèles.
Peut-être est-il temps, enfin, d’accueillir ces « oubliés du Synode », car l’unité de l’Église ne peut se construire sans l’écoute de tous ses membres, et sans une reconnaissance sincère des différentes formes de dévotion qui la nourrissent.