Dans une interview accordée à La Vie, Mgr Luc Ravel a répondu aux nombreuses critiques qui lui avaient été adressées. Voici quelques extraits de ses réponses :

En novembre 2022, j’ai été convoqué à Rome par le cardinal Ouellet, qui m’a fait part des reproches oralement, sans que je puisse prendre de notes. J’ai ensuite envoyé par écrit des réponses concernant les motifs factuels qui m’étaient reprochés.

Quels étaient les reproches du cardinal Ouellet à votre égard ?

Le fond du problème a toujours été la gouvernance. C’est la raison pour laquelle le pape a demandé ma démission. En particulier, il a évoqué une difficulté que j’aurais eue avec des prêtres, qui se sentiraient effrayés par ma façon de traiter les abus. Il m’a dit : “Vous en faites trop”. Je ne nie pas d’avoir pu commettre des maladresses, et je ne prétends pas être infaillible. Cependant, j’aurais préféré que les reproches soient plus concrets. Est-ce que j’ai fait preuve d’autoritarisme, ou ai-je pris des décisions autoritaires ? Je n’ai jamais pris de décision sans consulter mon entourage. Pas nécessairement mes conseils diocésains, mais des conseils personnels : avocats, médecins…

Est-ce que le cardinal vous a informé, à ce moment-là, que vous devriez démissionner ?

Absolument pas. La décision relève uniquement du pape, et elle m’a été transmise en février 2023 par le nonce apostolique à Paris.

Vous avez rendu publique votre démission le 20 avril 2023. Pourquoi avez-vous attendu deux mois ?

J’ai estimé que la démission devait être un acte libre, effectué en toute conscience. La décision du Saint-Père s’est imposée à moi instantanément. Cependant, comme aucune date ne m’avait été donnée, j’ai jugé nécessaire de conclure certains dossiers qui étaient récemment apparus. Je préférais le faire lorsque j’en avais les moyens, plutôt que de regretter toute ma vie de ne pas avoir pris certaines décisions concernant, par exemple, des collaborateurs proches.

Il existe une autre rumeur persistante à votre sujet. On prétend que vous avez manqué la messe chrismale le 12 avril 2022 pour assister au meeting d’Emmanuel Macron à Strasbourg. Quelle est la vérité ?

Lorsque j’ai entendu cette rumeur, j’ai été complètement surpris. Ce jour-là, j’ai assuré une conférence à distance pour les prêtres, car j’avais été testé positif au Covid le matin même. Je leur avais expliqué que je ne pourrais pas assister à la messe chrismale pour cette raison. À la fin du meeting, l’organisateur, Alain Fontanel (conseiller municipal En Marche de Strasbourg), m’a proposé de saluer le chef de l’État, conformément à la tradition concordataire. Je peux comprendre que cela ait été perçu comme maladroit.

[Concernant la conférence à distance, nous avions publié quelques photos qui suggèrent que les symptômes de Mgr ne concernent apparemment pas le Covid, mais la mémoire…]

Pourquoi avez-vous appelé à voter pour Emmanuel Macron le Vendredi saint 2022 ?

En tant qu’archevêque, j’ai appelé les gens à voter et à le faire en conscience. Les journalistes m’ont ensuite demandé mon choix de vote, et j’ai répondu en tant que citoyen que je votais pour Emmanuel Macron. Pourquoi aurais-je été empêché de l’exprimer ? Nous vivons en démocratie […]

Pendant la Semaine sainte 2023, vous avez décidé de prendre des mesures disciplinaires à l’encontre de votre évêque auxiliaire, Christian Kratz, dans le contexte de l’affaire de l’ancien aumônier du collège épiscopal Saint-Étienne de Strasbourg, Emmanuel Walch, qui s’est suicidé en janvier 2023 après avoir été accusé de faits répréhensibles en été 2022. Pourquoi avez-vous pris cette décision trois mois avant d’annoncer votre démission ?

La sanction qui a été prise était une mesure conservatoire. Il s’agit d’une action ordinaire de gestion qui a été prise après réflexion et prière. J’avais deux options : ne rien faire et laisser la responsabilité de gérer cette affaire à mon successeur, ou agir pendant que j’étais encore en fonction. Je suis désolé que cela ait été perçu comme une vengeance. C’était un choix difficile que j’ai fait en toute conscience, à la lumière des informations sérieuses dont je disposais. Ce n’était pas une décision arbitraire.

Quels reproches adressez-vous à Mgr Kratz ? Ce n’est pas lui qui était accusé de viol.

Je me réfère à l’enquête pénale en cours. De mon côté, j’ai fait tout ce que le droit canonique et le droit civil m’ont demandé de faire.

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