Une maison de prière ou un musée ? C’est la question que l’on est en droit de se poser depuis la réouverture de la cathédrale.
Presque un mois après sa réouverture Notre-Dame de Paris attire des foules impressionnantes. Le recteur Ribadeau-Dumas a indiqué que la première semaine ce sont plus de 270.000 visiteurs qui se sont présentés sur le parvis de la cathédrale.
Mais pour ceux qui souhaitent simplement prier ou se recueillir, la visite devient une épreuve de patience ou un parcours du combattant. Les files interminables, parfois plusieurs heures d’attente, témoignent d’un engouement populaire, certes légitime, mais révélateur d’un changement profond : la cathédrale n’est plus gérée comme une maison de prière, mais comme un musée ou un simple monument historique.
Alors que les touristes arpentent les lieux pour admirer l’architecture et les trésors qu’elle recèle, les fidèles, eux, doivent passer par internet pour venir prier. Contrairement à ce qu’indique le site officiel, il est pratiquement impossible d’entrer librement dans la cathédrale pour se recueillir. L’accès est conditionné par des contrôles de sécurité strictes et le recteur adjoint le père Guillaume Normand, cigarette au bec, est peu enclin à faire des exceptions et des différences entre un pèlerin catholique et un simple curieux. Cette gestion transforme la messe en une attraction parmi d’autres, dénaturant l’essence même du lieu.
Personne ne peut nier la qualité exceptionnelle de la restauration après l’incendie dévastateur de 2019. Les voûtes, les murs et les vitraux ont retrouvé une splendeur éclatante. Pourtant, cette perfection architecturale semble s’être accompagnée d’une perte de mystère et de profondeur spirituelle.
La lumière froide qui baigne désormais l’intérieur de la cathédrale renforce cette impression d’un lieu aseptisé, presque chirurgical. Autrefois, la douce pénombre de Notre-Dame invitait au recueillement et à la méditation. Aujourd’hui, cette ambiance unique semble avoir été sacrifiée sur l’autel de la modernité d’un musée comme tous les autres musées. La froideur lumineuse a levé le voile du mystère qui enveloppait ce lieu sacré, rendant l’atmosphère moins propice à la prière.
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Les célébrations liturgiques elles-mêmes ne sont pas épargnées par la critique. Les tenues sacerdotales modernes, qualifiées de « costumes de carnaval », déconcertent les fidèles en quête une liturgie plus solennelle davantage tournée vers la gloire de Dieu que vers celle d’un couturier. Le mobilier liturgique installé depuis la restauration, notamment un autel et un baptistère aux formes controversées, ajoute au sentiment d’une rupture avec le passé.
L’autel qualifié de « verrue de bronze » a perdu de son élégance, la pierre a disparu pourtant la plupart des autels sont en pierre ( s’il est en bois il contient une pierre d’autel),car la pierre d’autel a une signification, c’est par excellence le symbole du Christ, Pierre vivante, Pierre angulaire (la pierre qu’ont rejetée les bâtisseurs est devenue la pierre d’angle Psaume 118, St Matthieu 21-42), c’est bibliquement la pierre du sacrifice.
De son coté, l’ostensoir de la Sainte Couronne, surnommé par certains « l’œil de Caïn », est un autre exemple d’une conception artistique moderne,qui ne remet pas en cause le talent de l’artiste, mais sa capacité à approcher, à intégrer et à exprimer le sacré à travers son œuvre.
Ces choix, bien qu’esthétiquement audacieux, semblent éloignés de la vocation religieuse initiale de Notre-Dame de Paris et sans évoquer la polémique sur les symboles « pseudo-maçonniques », l’on constate des choix inadaptés qui ne sont pas en harmonie avec la splendeur architecturale.
Pourtant Notre-Dame de Paris est indéniablement un joyau de l’architecture gothique et un symbole universel de la foi catholique, et ce succès semble avoir un prix. En devenant une simple attraction touristique majeure, une partie de son âme semble s’être évanouie. La gestion actuelle, qui privilégie les flux de visiteurs au détriment des fidèles, reflète une tension entre son rôle religieux et sa popularité mondiale.
Les cathédrales, par essence, ne sont pas des musées. Elles sont des lieux vivants, dédiés à la prière, au recueillement et à la rencontre avec le divin. Notre-Dame de Paris est certes impeccable, mais peut-on encore y sentir la douceur d’un mystère sacré ? La question mérite d’être posée, et une réflexion s’impose pour redonner à ce lieu son caractère profondément spirituel.