Derrière l’image sympathique de Paul de Saint Sernin l’on a l’impression d’assister à un « reniement tranquille » d’une éducation et d’une formation solides, au profit des codes de l’esprit du monde.Dans une interview publiée dans LA VIE ce 19 septembre , PSS raconte son enfance dans une famille catholique traditionnelle : six enfants, un pensionnat en Irlande chez les moines, les scouts le samedi, la messe servie le dimanche. Un cadre solide, une éducation enracinée, bref, tout ce qui forgeait autrefois des chrétiens cohérents.Mais l’humoriste semble transformer ce bagage en folklore. Il explique qu’enfant, il se sentait marginalisé, différent, presque exclu : le seul à vouvoyer ses parents, le « Louis XVI » moqué au foot, le garçon en décalage. Et voilà qu’adulte, il se persuade d’avoir gagné sa liberté en abandonnant ces codes, pour adopter ceux de son temps : le foot comme rite d’inclusion, le langage cru comme signe d’authenticité, le jogging comme symbole de décontraction.
En réalité, ce « reniement tranquille » de son éducation ne l’affranchit pas, il l’enferme dans une nouvelle conformité : celle de l’esprit du monde.
En simplifiant le christianisme jusqu’à n’en garder qu’un vague message d’amour, Paul semble proposer une foi réduite au ressenti, privée d’exigence et de vérité. Saint Paul écrivait pourtant aux Romains : « Ne vous conformez pas au siècle présent, mais soyez transformés par le renouvellement de l’esprit » (Rm 12,2).
Paul accepterait-il de se présenter en jogging à un mariage, à une réception officielle ou à l’Élysée ? Pourquoi donc Dieu mériterait-il moins de considération que des hommes ?
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Il ne suffit pas de dire « c’est le cœur qui compte ». Bien sûr, le cœur est premier, mais l’homme est une unité de corps et d’âme. La disposition intérieure se traduit aussi par la tenue extérieure. Le vêtement, l’attitude, la manière de se tenir participent à préparer l’esprit pour la rencontre avec le Seigneur. Comme le disait saint François de Sales : « L’extérieur doit être l’image de l’intérieur. » Ce que nous montrons par notre corps aide notre âme à entrer dans le mystère. La liturgie elle-même, avec ses gestes, ses silences, ses rites, n’est rien d’autre que cela : une pédagogie du corps pour disposer l’esprit.
Et surtout, la sincérité n’est pas le monopole du fidèle « en baskets au fond de l’église ». Un chrétien pratiquant, fidèle et au premier rang peut être tout aussi sincère ,et souvent plus cohérent , dans sa foi. La vraie sincérité ne consiste pas à simplifier ou relativiser, mais à chercher Dieu de tout son cœur et à l’honorer par l’unité entre ce que l’on croit et ce que l’on vit.
Paul aime à répéter également qu’il est un « catho en jogging qui dit des gros mots chez Léa Salamé ». L’image est amusante, mais elle révèle aussi le piège : vouloir être catholique tout en cochant toutes les cases de l’air du temps : assumer sa vulgarité pour être plus trendy ( à la mode).
Le passage où il oppose « les prières en latin au premier rang » au fidèle « en basket au fond de l’église » illustre ce glissement. L’argument semble généreux, mais il est révélateur : le respect de la liturgie n’est pas une coquetterie sociale, c’est l’honneur dû à Dieu. On ne met pas une belle tenue pour rivaliser avec ses voisins, mais parce qu’on se tient devant le Roi des rois. Paul accepterait-il de se présenter en jogging à un mariage, à une réception officielle ou à l’Élysée ? Pourquoi donc Dieu mériterait-il moins de considération que des hommes ?
Et l’on voit bien le mécanisme : il suffit de caricaturer un catholique fidèle et cohérent en « pharisien » pour justifier toutes les dérives et toutes les compromissions. C’est tellement commode, c’est la tarte à la crème des progressistes : accuser de pharisaïsme ceux qui prennent leur foi au sérieux.
Mais rappelons-le : les pharisiens que le Christ a dénoncés n’étaient pas ceux qui vivaient fidèlement la loi, mais ceux qui la connaissaient par cœur sans se l’appliquer. Or les pharisiens modernes sont précisément ces membres de l’Eglise ( surtout les Jésuites) et ces intellectuels, parfois parmi les plus instruits, qui manipulent la doctrine, la proclament de façon biaisée, et savent pourtant, au fond d’eux, que ce qu’ils enseignent n’est pas en phase avec la foi qu’ils devraient servir.Paul de Saint Sernin amuse, c’est vrai. Il fait rire, parfois même réfléchir. Mais derrière le rire, il y a le signe d’un héritage sacrifié sur l’autel du conformisme mondain. On croit voir un affranchi. On découvre surtout un enfant de l’Église qui, pour plaire à son temps, s’applique à sourire en reniant doucement ce qui l’a formé.
								

