Partout dans le monde, l’appartenance religieuse influence bien au-delà de la sphère privée. Elle façonne les comportements, nourrit les débats de société et inspire les décisions politiques. Aux États-Unis, on l’a encore vu lors des dernières campagnes électorales : Donald Trump a su mobiliser un électorat évangélique qui a pesé lourd dans son ascension et son maintien comme figure centrale de la droite américaine. Ce rôle croissant de la foi dans l’espace public n’est pas une exception :
les valeurs religieuses sont souvent à la racine de l’histoire et de l’identité d’un pays. Ignorer ce fait, c’est méconnaître la profondeur de la vie sociale et culturelle des peuples.
C’est dans ce contexte que le prestigieux New York Times a choisi de replacer la question religieuse au cœur de son offre éditoriale. Le quotidien, fondé en 1851 et aujourd’hui l’un des journaux les plus influents au monde, a récemment ouvert une rubrique « Religion » sur son site internet et lancé une newsletter hebdomadaire intitulée Believing (« Croire »). À l’origine du projet, la journaliste Lauren Jackson explique : « L’an dernier, j’ai décidé de créer Believing, un projet du New York Times qui explore comment la religion et la spiritualité influencent la vie des gens ».
Ayant grandi dans l’Église de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours (mormons) avant de s’en éloigner, elle confie que cette expérience personnelle a nourri son désir de comprendre et de raconter l’impact de la foi sur les existences. Pour ce travail, elle a voyagé dans plusieurs pays, interrogé des centaines de personnes et écouté plus de 5 000 lecteurs du Times, croyants ou non, qui demandaient une couverture plus sérieuse de la religion.Le lancement de Believing a coïncidé avec un événement tragique qui a bouleversé les États-Unis : l’assassinat de Charlie Kirk, intellectuel évangélique conservateur. Quelques minutes avant sa mort sur un campus de l’Utah, il avait participé à un débat théologique sur le protestantisme et le mormonisme. La journaliste Lauren Jackson souligne que « la foi est présente dans presque chaque détail de ce drame », depuis le parcours du suspect ,élevé dans un environnement mormon, jusqu’aux références à la prière dans les discours politiques qui ont suivi. Ce premier numéro a frappé fort : il montre combien la religion demeure enracinée dans la société américaine, même dans des contextes inattendus, et combien elle reste un facteur déterminant de compréhension de l’actualité.
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Avec Believing, le New York Times assume un choix clair : consacrer un espace hebdomadaire à l’étude des croyances et des pratiques spirituelles, qu’elles soient traditionnelles ou nouvelles.
L’objectif est double : comprendre comment les religions influencent la culture, la politique et la vie sociale, et offrir un espace où croyants et non-croyants peuvent se reconnaître. Jackson insiste : « La mission de Believing est de parler du sacré, sous toutes ses formes, dans un espace très séculier ». Cette démarche répond à une attente forte : des milliers de lecteurs réclamaient que l’on prenne la religion « au sérieux », sans la réduire à une curiosité ou à une polémique.Le choix du New York Times est plus qu’une innovation éditoriale : c’est un signal envoyé au monde médiatique occidental. La religion n’a pas disparu. Elle continue de structurer les identités, d’alimenter les débats et de questionner le sens de l’existence. En Europe, où certains médias se tiennent à distance de ces sujets ou les abordent uniquement par le prisme culturel, l’initiative du NYT rappelle une évidence : l’homme moderne n’a pas cessé de chercher, de croire, d’espérer.