Depuis la nomination de l’artiste Claire Tabouret, chargée de concevoir six grandes baies pour les chapelles sud de la cathédrale, les critiques s’intensifient. Le gouvernement, avec le soutien de l’archevêché de Paris, souhaite « faire entrer le XXIᵉ siècle dans Notre-Dame », une ambition soutenue par Emmanuel Macron mais qui divise profondément.
Le projet concerne six baies de 121 m², actuellement occupées par des vitraux du XIXᵉ siècle créés par Eugène Viollet-le-Duc. Ces œuvres, classées monuments historiques, forment un ensemble cohérent qui incarne la vision architecturale de Viollet-le-Duc. « Viollet-le-Duc n’était pas seulement un restaurateur, c’était un génie », insiste Julien Lacaze, président de Sites et Monuments. Selon lui, remplacer ces vitraux par des créations contemporaines est une erreur manifeste.
L’approche de Claire Tabouret a également été vivement critiquée. Sa proposition de conserver les cadres tout en vidant les vitraux de leur contenu d’origine est perçue comme un compromis malheureux. « Il y a une hésitation, un malaise. C’est bancal et absurde », déplore Julien Lacaze. Tabouret, une artiste formée dans un parcours académique traditionnel, incarne selon lui une rupture nette avec l’esprit créatif et visionnaire de Viollet-le-Duc, dont le style audacieux avait déjà bousculé les conventions de son époque.
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Le projet a également déclenché une réaction publique massive. Une pétition lancée en décembre 2023 par le site La Tribune de l’Art dénonce « un manque d’égard pour le patrimoine » et a recueilli près de 260 000 signatures. Didier Rykner, fondateur du site, souligne que les vitraux de Viollet-le-Duc sont indissociables de l’unité architecturale de la cathédrale et que ce projet compromet gravement cette cohérence.
L’association Sites et Monuments, membre de la Commission nationale du patrimoine et de l’architecture (CNPA), s’appuie sur des arguments solides pour son recours. La CNPA a déjà rejeté le projet à l’unanimité en juillet 2024, un fait rare. Cependant, le gouvernement a décidé de passer outre, sélectionnant huit projets artistiques, dont celui de Claire Tabouret, retenu en décembre.
Comme l’indique Le Figaro, la décision finale repose désormais sur le préfet de la région Île-de-France, qui doit délivrer une autorisation de travaux. Cet acte, attaquable dans un délai de deux mois, sera déterminant pour l’avenir du projet.
Ce débat sur les vitraux de Notre-Dame illustre une tension plus large entre l’art contemporain et le respect du patrimoine historique religieux. Le projet de Claire Tabouret, en particulier, soulève des questions sur la place de la modernité dans un édifice tourné vers Dieu. Les défenseurs du patrimoine espèrent que la justice tranchera en faveur d’une préservation fidèle à l’héritage de Viollet-le-Duc.
Ajoutons que l’idée d’un référendum ou d’une consultation publique en ligne pourrait offrir une réponse à cette controverse, permettant à tous de se prononcer sur l’avenir d’un patrimoine religieux symbole de la France.