Il était moine et prieur du monastère Saint-André du Mont Cœlius, une des sept collines de Rome, quand saint Grégoire le Grand décida de briser la paix de son cloître. L’urgence missionnaire le commandait : les Anglo-Saxons, peuples païens venus d’au-delà la mer, avaient conquis la Bretagne, refoulant les Bretons chrétiens. Ces derniers, humiliés et meurtris, refusaient d’évangéliser leurs anciens ennemis. Alors le pape regarda vers ses moines.
Augustin fut choisi pour porter la lumière de l’Évangile dans les brumes du Nord. Avec quarante compagnons, tous moines comme lui, il partit pour cette mission ardue. La route fut longue, marquée d’étapes à Lérins, à Paris, et dans d’autres lieux. Mais ce sont les bénédictions du pape et l’obéissance à l’Église qui soutinrent la colonne romaine jusqu’au royaume du Kent.Le roi Éthelbert, encore païen, les accueillit favorablement. Son épouse, la reine Berthe, était chrétienne. Touché par la ferveur et la simplicité des moines, le roi demanda bientôt le baptême. Ce fut le début d’un profond enracinement de la foi en terre anglaise. Saint Augustin fonda le siège épiscopal de Cantorbéry, y établissant une Église hiérarchique, enracinée dans la liturgie romaine.
Mais tout ne fut pas sans peine. Le moine devenu évêque se heurta à l’antique Église celtique, restée fidèle à ses usages. À Bangor, lorsqu’il convoqua les évêques bretons pour les appeler à reconnaître son autorité comme primat nommé par le pape, il commit une faute que saint Bède le Vénérable rapportera avec sévérité : Augustin, au lieu de se lever pour les accueillir, demeura assis. Ce geste, perçu comme un mépris, acheva de braquer les prélats gallois. Ils repartirent, laissant le fossé ouvert entre les chrétiens bretons et les missionnaires romains. Il faudra près d’un siècle pour refermer cette blessure.
Saint Augustin, toutefois, poursuivit son œuvre. Il multiplia les conversions, fortifia les jeunes communautés chrétiennes, et organisa l’Église d’Angleterre selon le modèle romain, avec plusieurs sièges épiscopaux. Jusqu’à sa mort, survenue vers 604, il demeura un pasteur attentif, un évangélisateur infatigable, un homme d’unité.
L’Église fait mémoire de lui le 26 mai, comme évêque de Cantorbéry et apôtre des Angles. Son œuvre, commencée sur l’ordre du pape, scelle encore aujourd’hui le lien profond entre la Rome éternelle et la chrétienté anglaise.
Avec nominis