Depuis la chute du régime de Bachar al-Assad le 8 décembre dernier, la Syrie traverse une période de transition délicate, marquée par l’instabilité politique et une insécurité croissante. Malgré ce climat d’incertitude, le père Bahjat Elia Karakach, curé d’Alep et franciscain de la Custodie de Terre Sainte, observe une mobilisation nouvelle des chrétiens et particulièrement des jeunes, prêts à s’engager pour l’avenir de leur pays.
« En Syrie, nous continuons à vivre des moments de grande instabilité, où les tensions géopolitiques risquent de compromettre encore davantage l’avenir de notre terre », explique le père Karakach
Aujourd’hui, le pays reste morcelé. Le nord-est est toujours sous le contrôle des milices kurdes, soutenues par les États-Unis. Au sud, la présence militaire israélienne s’intensifie, notamment autour du plateau du Golan, un facteur de tensions supplémentaires.Dans les territoires administrés par les nouvelles autorités issues de la coalition rebelle, menée par Ahmed al Sharaa (alias Mohammed al-Jolani, aujourd’hui président par intérim de la Syrie), la situation est préoccupante. « Vols, assassinats, vendettas et enlèvements sont devenus monnaie courante », alerte le prêtre. Sur le plan économique, « la forte instabilité de la livre syrienne rend presque impossibles les transactions », entraînant un ralentissement des activités et une hausse du chômage.
Malgré cette situation alarmante, le père Karakach perçoit des signes d’espoir. « Un élan de renouveau naît au sein de notre société. »Les Syriens, et en particulier les jeunes chrétiens, expriment une volonté croissante de s’impliquer dans la vie politique, conscients que l’avenir du pays dépend aussi d’eux.À Alep, l’Église catholique joue un rôle actif dans cet engagement civique en organisant des soirées hebdomadaires dédiées à la doctrine sociale de l’Église et des débats sur les grands enjeux politiques et sociaux. Ces moments de réflexion permettent aux participants d’explorer les valeurs de justice, de solidarité et de paix, essentielles pour reconstruire un avenir stable.
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En parallèle, le père Karakach anime avec un journaliste chrétien la plateforme Add Alsama (chaîne YouTube), créée il y a trois ans pour offrir une voix aux chrétiens de Syrie. « Depuis la chute du régime et l’introduction de contenus sur la doctrine sociale, nous avons constaté une augmentation exponentielle de nos abonnés », explique-t-il. Un signe que les Syriens s’intéressent de plus en plus à ces sujets et cherchent à s’impliquer activement dans la reconstruction politique du pays.
Cette dynamique a été encouragée par la récente visite en Syrie du cardinal Claudio Gugerotti, préfet du Dicastère pour les Églises orientales, qui s’est rendu à Alep.Le cardinal a souligné « le rôle crucial que les chrétiens peuvent et doivent jouer dans la reconstruction de la Syrie ». Il a exhorté la communauté à œuvrer ensemble « pour un avenir de réconciliation et d’espérance ».« Ses paroles ont insufflé une nouvelle confiance à une communauté qui, malgré les épreuves, continue de rêver d’un avenir de paix et d’unité », témoigne le père Karakach.
« Nous avons confiance que le dialogue, l’engagement de nos jeunes et le partage des valeurs chrétiennes peuvent contribuer à une renaissance durable de notre terre bien-aimée », conclut-il.
Dans un pays encore fragilisé, les chrétiens apparaissent comme des piliers de la reconstruction. Leur engagement, ancré dans leur foi et leur désir de justice, pourrait bien aider la Syrie à retrouver un chemin de stabilité et d’espérance.
Source Agensir