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« LA FRANCE A PEUR » de Noël, et ce sont les chrétiens qui s’effacent

Marché de Noël  à Strasbourg suite à l'attentat du 11 décembre 2018 - Depositphotos
Marché de Noël à Strasbourg suite à l'attentat du 11 décembre 2018 - Depositphotos
« La France a peur» Le 18 février 1976, Roger Gicquel ouvrait ainsi le journal télévisé de TF1. Près d’un demi-siècle plus tard, la formule résonne à nouveau, mais pour des raisons différentes

Editorial par Philippe Marie

Aujourd’hui, la peur n’est plus seulement celle de l’insécurité ou du crime ; elle est devenue la peur de célébrer Noël, la peur de dire la naissance de Jésus-Christ, la peur de célébrer l’unique espérance de ce monde, la peur d’assumer publiquement ce qui fut longtemps au cœur de l’identité française.La justification avancée est désormais bien rodée : « le respect dû à ceux qui ne sont pas chrétiens, l’attention à ne pas heurter leur sensibilité ». Soit. Mais qui, aujourd’hui, se soucie de ne pas heurter la sensibilité des chrétiens ? Qui protège encore leur identité religieuse, pourtant intimement liée à l’histoire, à la culture et à l’âme de la France ?

Cette question traverse silencieusement notre société à l’approche des fêtes de Noël. Elle se pose alors même que les autorités reconnaissent une menace terroriste élevée et multiplient les dispositifs de sécurité autour des marchés de Noël, tandis que, dans le même temps, le sens même de Noël est progressivement vidé de sa substance chrétienne. Les célébrations sont protégées, mais leur signification est neutralisée.

La peur de la folie terroriste est bien réelle et ne doit pas être minimisée. Elle est aujourd’hui assumée par l’État lui-même. Tout le monde a en tête l’attentat du marché de Noël de Strasbourg le 11 décembre 2018.Aussi à l’approche des fêtes, Laurent Nuñez, secrétaire général du ministère de l’Intérieur, a appelé les préfets à renforcer les capacités de renseignement, de détection et de prévention, à assurer une présence dissuasive des forces de l’ordre, à intensifier la vidéosurveillance et à contrôler plus strictement les flux de population. Les marchés de Noël deviennent des espaces sous haute surveillance, parfois barricadés, où l’on circule sous l’œil des caméras et des patrouilles. Mais cette peur sécuritaire en masque une autre, plus profonde et plus silencieuse.

Peu à peu, les chrétiens deviennent une cible double : cibles potentielles de la violence terroriste, et cibles culturelles d’un discours qui tolère la foi à condition qu’elle disparaisse de l’espace public. De la laïcité, nous sommes passés à l’athéisme.

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Pour cela, l’État est bien aidé par une partie de l’Église de France, qui « copine » largement avec les sphères du pouvoir et se plie volontiers à toutes leurs revendications dites de « neutralité laïque », un vrai-faux prétexte pour justifier tout et n’importe quoi. À la peur du terrorisme s’ajoute ainsi celle d’une idéologie radicale laïque, qui refuse toute légitimité publique au christianisme tout en revendiquant une protection accrue pour les expressions religieuses « venues d’ailleurs ».Dans ce contexte s’impose également un mot devenu central et rarement questionné : l’« inclusion ». Car l’inclusion telle qu’elle est aujourd’hui prônée apparaît de plus en plus comme un leurre, un véritable piège d’exclusion des valeurs chrétiennes. Sous couvert d’accueillir toutes les différences, elle opère en réalité une sélection idéologique : certaines identités doivent être protégées et valorisées, d’autres doivent s’effacer. L’identité chrétienne, pourtant majoritaire et fondatrice, est ainsi sommée de se rendre invisible pour ne pas troubler un équilibre artificiel.

Enfin, il y a la peur la plus insidieuse : la peur d’être soi-même. Peur d’assumer une identité chrétienne dans l’espace public, peur de dire que Noël n’est pas une simple fête d’hiver interchangeable, peur de rappeler que la France est née, culturellement et spirituellement, du christianisme. Une peur intériorisée, qui conduit à l’autocensure et au renoncement à sa foi chrétienne : c’est la fin du témoignage. Ainsi, au nom de la sécurité et du vivre-ensemble, les chrétiens deviennent une communauté sous surveillance, contrainte de se justifier pour célébrer, de se faire discrète pour ne pas déranger. Une communauté qui n’est pas encore persécutée physiquement au sens strict, comme les chrétiens du Nigeria, mais qui est clairement marginalisée.

Et pourtant, l’Évangile le rappelle avec force : « Vous êtes le sel de la terre » (Mt 5,13). Le sel ne disparaît pas pour survivre, il donne saveur et sens. Une société qui demande aux chrétiens de renoncer à leur visibilité spirituelle se condamne elle-même à l’affadissement, et elle meurt.

À force de sécuriser Noël sans jamais en défendre le sens, la France ne se contente pas de protéger des marchés ou des flux de visiteurs. Elle accepte, consciemment ou non, d’enfermer la foi chrétienne dans un périmètre toléré, étroit, presque clandestin. Elle laisse s’effacer une identité qui a façonné son histoire, son calendrier, son art, son droit et sa vision de l’homme. Ce qui est en jeu n’est pas un décor folklorique ni une tradition parmi d’autres, mais la capacité d’un pays à assumer ce qu’il est, sans s’excuser d’exister.Car la crèche n’est pas une menace pour la cohésion nationale. Elle en est l’une des sources. Ce qui fragilise profondément la société, ce n’est pas l’affirmation paisible d’une foi héritée, mais le renoncement, dicté par la peur, à toute affirmation. Une nation qui se protège sans se reconnaître, qui surveille sans transmettre, qui célèbre sans nommer, finit par ne plus savoir ce qu’elle défend. Et lorsqu’un pays cesse d’assumer son âme, il ne fait plus que gérer son déclin.

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