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Églises de France, quand l’État veut, il peut : L’exemple de la reconstruction de l’église de Drosnay

ruines de l’église de Drosnay lors de l'incendie de 2023 - DR
ruines de l’église de Drosnay lors de l'incendie de 2023 - DR
Si l'État continue d'investir dans la protection et la restauration des églises à travers le pays, comme il l’a fait pour l’église de Drosnay, cela renforcerait la reconnaissance de leur rôle primordial dans l’histoire de France et dans la construction de son identité

Le 7 juillet 2023, les habitants de Drosnay, un petit village de la Marne, ont été témoins d’une tragédie qui a touché leur patrimoine : l’église du village, entièrement construite en bois, a été réduite en cendres par un incendie dévastateur. Cette église, classée monument historique en 1982, était un véritable symbole de l’architecture en pans de bois du pays du Der, une région qui regorge de bâtiments exceptionnels de ce type. Elle renfermait des trésors historiques, comme un vitrail du 16e siècle et un retable du 17e siècle, qui ont disparu dans les flammes. En moins d’une heure, il ne restait plus que l’entrée de l’église, marquée par la violence du feu.

Mais presque deux ans après cette catastrophe, l’opération de reconstruction à l’identique de l’église de Drosnay a enfin pu avoir lieu, sur décision de la DRAC par l’intermédiaire de l’Architecte des Bâtiments de France. Un soulagement pour les habitants et un geste symbolique pour la préservation du patrimoine religieux français.

Anne-Marie Vermeulen, présidente de l’association de sauvegarde de l’église de Drosnay, a exprimé son enthousiasme suite à cette annonce : « C’est un soulagement, et en même temps une grande joie, parce que c’est quand même un événement important pour le village. Désormais, le projet est validé, l’église sera reconstruite à l’identique. Ça prendra certainement de nombreuses années, mais aujourd’hui on a la certitude que les travaux vont démarrer en ce sens ». Il ne s’agit pas simplement de reconstruire un bâtiment ; il s’agit de restaurer une partie de l’histoire locale et de maintenir vivante une tradition architecturale unique.

L’importance du classement et de la préservation du patrimoine religieux national

Ce projet de reconstruction soulève une question cruciale : celle de la préservation du patrimoine religieux dans son ensemble. L’église de Drosnay est un exemple parmi tant d’autres du patrimoine exceptionnel que représente le réseau d’églises en France. Le classement de ces édifices, qu’ils soient en bois, en pierre ou en brique, n’est pas seulement un acte de sauvegarde architecturale, mais un geste d’une importance historique fondamentale. Ces églises sont des témoins essentiels de l’histoire de France, non seulement sur le plan religieux, mais aussi sur le plan culturel, social et historique.

Le patrimoine religieux français, qui inclut des milliers d’églises à travers tout le pays, reflète l’évolution de la société française au fil des siècles. Chaque édifice raconte une histoire unique, qu’il s’agisse de l’artisanat, de l’architecture ou des événements marquants qui s’y sont déroulés. Ces églises sont, pour la plupart, des monuments vivants, imprégnés de siècles de prière, de rassemblement et de mémoire collective.

Il serait donc pertinent que l’ensemble des églises de France soit systématiquement classé, ou au moins reconnu pour son intérêt national, afin de garantir leur protection à long terme. Un tel classement permettrait non seulement de préserver ce patrimoine exceptionnel, mais aussi de lui offrir les ressources nécessaires pour sa rénovation et son entretien. Si l’État continue d’investir dans la protection et la restauration des églises à travers le pays, comme il l’a fait pour l’église de Drosnay, cela renforcerait la reconnaissance de leur rôle primordial dans l’histoire de France et dans la construction de son identité. Une telle démarche permettrait aussi d’enrichir la mémoire collective des Français, en offrant à chacun la possibilité de se reconnecter à l’histoire et à la culture de son pays à travers ses édifices religieux.

Un précédent et un modèle pour d’autres églises en péril

Concernant l’église de Drosnay, le budget pour cette reconstruction reste encore flou, en grande partie à cause de l’ambiguïté sur ce que l’on entend par « reconstruction à l’identique ». Emmanuel Le Roy, le maire de Drosnay, souligne que le montant des travaux pourrait énormément varier, notamment en fonction des matériaux utilisés et de la méthode de construction choisie. « L’inconnue majeure, c’est : qu’est-ce qu’on appelle reconstruction à l’identique ? Ça va impliquer tout un tas de corps de métiers, d’éléments qui vont définir le montant des travaux », indique-t-il.

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Pourtant, l’association de sauvegarde se montre optimiste grâce à l’existence de plans de l’église datant de 1970, ce qui facilitera le travail des architectes. Le projet est prévu pour être terminé d’ici 2028, une échéance réaliste selon la préfecture de la Marne. Ce projet sera financé en partie par des subventions publiques, mais aussi par des dons privés. L’implication des habitants et des collectivités environnantes a été décisive dans cette dynamique de reconstruction.

Ce projet de reconstruction à l’identique de l’église de Drosnay pourrait servir de modèle pour d’autres églises en péril en France. Le pays compte des centaines de bâtiments religieux, dont beaucoup nécessitent des travaux urgents, que ce soit pour des raisons de sécurité, de conservation ou de respect de leur caractère historique. Mais ce modèle soulève également une question plus large : quelle place l’État français accorde-t-il vraiment à la préservation de ce patrimoine religieux ? Si l’exemple de Drosnay est un succès, il reste encore de nombreuses églises menacées par la négligence, la vétusté, ou la vente à des fins non religieuses.

La validation du projet de reconstruction de l’église de Drosnay par l’État montre que, lorsqu’il y a une volonté politique forte et des moyens mis en place, la sauvegarde du patrimoine religieux peut être assurée. Cela nécessite une vision claire de l’importance de ces édifices non seulement en tant que lieux de culte, mais aussi en tant que témoignages vivants de l’histoire et de la culture de la France.Cette décision pourrait bien faire écho dans d’autres régions de France, incitant ainsi les autorités à considérer avec plus d’attention la préservation du patrimoine religieux. Si l’État veut vraiment protéger et entretenir les églises de France, il dispose des outils nécessaires pour agir efficacement, comme en témoigne la reconstruction de l’église de Drosnay. Mais pour que cette volonté se traduise concrètement, il faut un engagement constant et un financement soutenu, au service de la mémoire collective et du patrimoine spirituel.

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