L’évêque du diocèse d’Ajaccio, a récemment été élevé au rang de cardinal par le pape François. Dans une interview accordée à Valeurs actuelles, le cardinal Bustillo aborde divers sujets liés à l’Église et à la société française.
Voici les passages marquants de cette entrevue:
Le cardinal Bustillo souligne que l’Europe a beaucoup à offrir au catholicisme en raison de ses racines, de son histoire et de son patrimoine, malgré sa fragilité numérique. Il estime que le pape François ne méprise pas l’Europe, mais qu’il favorise également d’autres potentiels provenant d’autres régions du monde. Il plaide pour une collaboration entre l’Europe âgée et d’autres Églises venant d’Afrique, d’Asie ou d’Amérique.
« Je le rappelle à plusieurs reprises dans Le cœur ne se divise pas : cinquante-cinq ans après Mai 68, on a totalement évacué Dieu.Sommes-nous plus heureux ? Avons-nous soldé tous nos problèmes ? Je ne crois pas. Nous sommes plus individualistes, plus matérialistes et plus malheureux. »
Concernant les divisions au sein de l’Église en France, le cardinal Bustillo affirme que la situation est dangereuse pour l’annonce de l’Évangile. Il reconnaît qu’il y a des différences légitimes entre les catholiques, mais met en garde contre la tendance à passer de la différence à la division. Il souligne l’importance cruciale de l’unité au sein de l’Église, malgré les différences.
L’évêque d’Ajaccio exprime sa préoccupation quant à la perception de l’Église par le public, soulignant que l’Église est souvent réduite à sa machinerie ecclésiastique et à ses failles. Il plaide pour un retour à l’Évangile et à l’enseignement de Jésus, mettant en avant les valeurs chrétiennes de l’amour, du pardon et du respect.
« Lorsqu’un peuple ne respecte plus le sacré il tombe vite dans la barbarie »
Le prélat identifie un défi majeur dans la sécularisation massive en Occident et son impact sur la société. Il estime que la violence est le signe évident de notre malheur et que Dieu peut nous aider à dompter notre propre violence grâce à une vie spirituelle solide.Le cardinal Bustillo ne considère pas les processions religieuses comme un remède absolu, mais les trouve bénéfiques. Il les décrit comme des manifestations joyeuses de la foi, où les chrétiens portent Dieu à travers les rues, rappelant ainsi la présence divine.
L’évêque corse exprime une perspective nuancée sur l’islam en France, reconnaissant la crispation liée à la peur, mais soulignant également que l’islam peut être stimulant pour les catholiques français. Il appelle les catholiques à assumer leur propre foi avant de critiquer les autres.
L’islamisme est une idéologie à combattre, cela va de soi, mais je trouve pour ma part l’islam plutôt stimulant.L’islam devrait interroger chacun sur son
rapport à ses traditions, à sa foi. Les musulmans gardent leurs traditions en arrivant en France, ils sont fidèles, et que font les catholiques français ?…..Je voudrais demander aux catholiques français :
“Qu’avez-vous fait de votre propre foi ?”Avant d’accuser les autres, il faut faire son examen de conscience. »
Le cardinal commente la tendance de la jeunesse française à se désintéresser de la religion, attribuant cela à une transmission défaillante des valeurs religieuses par les générations précédentes. Il voit un potentiel pour que les jeunes redécouvrent la foi si les catholiques parviennent à les stimuler.Le cardinal Bustillo réagit également à la violence dans la société, appelant à une transmission précoce des valeurs telles que le respect et l’attention à l’autre. Il suggère que l’évacuation de Dieu de la société a contribué à l’augmentation de la violence.
Que font les familles ? Qui leur transmet les valeurs ? Tel ministre voudrait proposer des cours d’éthique à l’école ou que sais-je encore. Qu’il envoie plutôt les jeunes au catéchisme
Le cardinal Bustillo reconnaît la complexité de la question de l’immigration en France et appelle les responsables politiques à prendre leurs responsabilités. Il souligne également l’importance pour les chrétiens de maintenir des relations interpersonnelles humanisées avec les étrangers.
Dans cet interview , le cardinal François-Xavier Bustillo insiste sur l’importance de l’unité au sein de l’Église, de la douceur dans la communication de la foi et de la nécessité de réparer et de rétablir des « relations positives » avec le monde.
Entretien donné à Valeurs Actuelles le 21 décembre 2023