Depuis 2000 ans

Inde : deux religieuses catholiques arrêtées à Chhattisgarh sous de fausses accusations de conversion forcée

Sœur Preeti Mary et Sœur Vandana Francis - DR
Sœur Preeti Mary et Sœur Vandana Francis - DR
Malgré l’absence de preuves et la présence de documents de consentement parental, deux sœurs de l’Assisi Sisters of Mary Immaculate ont été arrêtées, victimes d’un harcèlement orchestré par des extrémistes hindous. L’Église catholique dénonce une grave dérive liberticide

Une nouvelle fois, la liberté religieuse est foulée aux pieds en Inde et la longue et persistante persecution des chrétiens continue… Samedi 26 juillet, deux religieuses catholiques, Sœur Preeti Mary et Sœur Vandana Francis, membres de la congrégation des Assisi Sisters of Mary Immaculate (ASMI), ont été arrêtées à la gare de Durg, dans l’État de Chhattisgarh, en compagnie d’un jeune homme, Sukhman Mandavi. Elles accompagnaient trois jeunes femmes adultes, âgées de 18 à 19 ans, vers Agra où un emploi les attendait. Pourtant, malgré des documents d’identité valides et des lettres de consentement parental, elles ont été inculpées pour traite d’êtres humains et conversion religieuse forcée, en vertu de lois régulièrement instrumentalisées contre les minorités chrétiennes.

L’affaire ne trouve pas son origine dans une plainte officielle ou une enquête de police, mais dans une dénonciation par un contrôleur de billets, qui a préféré alerter des membres locaux du Bajrang Dal, une organisation extrémiste hindoue , plutôt que les autorités compétentes. Rapidement, une foule de militants s’est rassemblée, intimidant les religieuses et les jeunes femmes sur le quai, puis devant le commissariat. La police, sous pression, a ouvert une enquête sans fondement réel. Les religieuses ont été placées en détention provisoire jusqu’au 8 août, tandis que les jeunes femmes ont été envoyées dans un foyer public.

Selon le vicaire général de l’archidiocèse de Raipur, le père Sebastian Poomattam, les jeunes femmes étaient majeures et avaient reçu une proposition d’emploi comme aides de cuisine dans des couvents à Agra, avec des salaires allant de 8 000 à 10 000 roupies. « Tout était légal. Les religieuses avaient les billets, les documents d’identité et les lettres des parents », a-t-il déclaré à The News Minute. Rien n’y a fait.

Harcèlement public, silence des autorités

Plusieurs vidéos relayées sur les réseaux sociaux montrent les religieuses humiliées publiquement par les militants du Bajrang Dal, notamment sous la houlette de Jyoti Sharma. Les forces de l’ordre, pourtant présentes, n’ont pas levé le petit doigt. Aucune plainte n’a été déposée contre les agresseurs. « Nous pensons que les jeunes femmes ont été contraintes de changer leur version. Tout cela est une mise en scène pour criminaliser des religieuses innocentes », a dénoncé Sœur Asha Paul, de la Congrégation de la Sainte-Famille, à Delhi.

La Conférence des évêques catholiques de l’Inde (CBCI) a fermement condamné l’arrestation : « Les jeunes femmes étaient majeures, leur déplacement était volontaire, il n’existe aucune preuve de conversion. C’est une violation grave des droits constitutionnels. » Le Conseil des évêques catholiques du Kerala (KCBC) a dénoncé « des accusations mensongères et sans fondement ». Dans un communiqué officiel, le KCBC souligne que « cette affaire s’inscrit dans une tendance inquiétante d’hostilité croissante envers les chrétiens et les missionnaires. L’usage détourné des lois anti-conversion par des groupes extrémistes constitue une menace directe à la liberté religieuse garantie par la Constitution. Les missionnaires catholiques n’ont jamais pratiqué de conversions forcées. »

Le United Christian Forum (UCF) rappelle que les violences contre les chrétiens sont en forte hausse : de 127 incidents en 2014 à 834 en 2024. Une persécution structurelle s’installe.

Lire aussi

Plusieurs personnalités politiques ont réagi

K.C. Venugopal, secrétaire général du Congrès, a saisi le ministre de l’Intérieur et le chef du gouvernement de Chhattisgarh : « Lorsqu’un consentement écrit est ignoré et que la police agit sous pression de groupes radicaux, c’est l’État de droit qui s’effondre. » Le député John Brittas (CPI-M) a dénoncé une « instrumentalisation honteuse de la loi pour cibler les minorités. »Le KCBC a réclamé une intervention du Premier ministre Narendra Modi : « Le gouvernement central ne peut pas rester silencieux. La démocratie et la liberté religieuse sont en jeu. »

Cette affaire illustre une fois de plus la fragilité de la condition chrétienne dans certaines régions de l’Inde. Là où l’Église propose un service désintéressé, où des religieuses cherchent simplement à aider des jeunes femmes à trouver un emploi digne, la suspicion, la haine et la violence trouvent un terrain fertile. La « chasse aux sorcières » menée par les extrémistes hindous sous couvert de lois anti-conversion est une forme moderne de persécution que l’Occident et les institutions internationales ne peuvent ignorer plus longtemps.

« Bienheureux serez-vous, quand les hommes vous haïront, vous excluront, vous outrageront et rejetteront votre nom comme infâme, à cause du Fils de l’homme » (Lc 6, 22).

Recevez chaque jour notre newsletter !