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Le pape en Corse: voyage au cœur de l’héritage franciscain

Couvent de Saint François à Corte - DR
Couvent de Saint François à Corte - DR
Cette piété populaire que vient célébrer le Pape François se transmet dés l'enfance et tout comme la langue corse et certaines traditions culinaires de l'ile, elle constitue l'ADN de tout Corse.

La Corse, île méditerranéenne au patrimoine naturel exceptionnel, est également une terre de foi chrétienne qui a profondément marqué l’histoire de l’île. Depuis les premiers siècles de notre ère jusqu’à aujourd’hui, le christianisme a façonné l’identité spirituelle et culturelle des Corses.Ce dimanche 15 décembre le Pape François se rendra sur l’Ile de Beauté à la rencontre d’une Corse qui est restée chrétienne et du cardinal Bustillo, digne héritier de la présence franciscaine.

L’évangélisation de la Corse : L’impulsion des franciscains

En 1219, Saint François d’Assise, fondateur de l’ordre des Franciscains, envoie des missions dans plusieurs régions méditerranéennes, dont la Corse. Les franciscains s’impliqueront dans la construction d’églises et de chapelles à travers l’île. Missionnés par le pape pour prêcher la parole du Christ, ils fondent plusieurs couvents à travers l’île, parmi lesquels ceux de Belgodère, de Zuani, de Bastia, de Piedicroce, de Corte et d’Alesani, marquant ainsi leur empreinte spirituelle dans les montagnes et les vallées corses.

L’un des premiers couvents est celui de San Francesco à Corte, fondé en 1474 par Antonio Stoncone, après y avoir été autorisé par le Pape Eugene IV. Ce couvent fut agrandi dans la seconde moitié du XVIIeme siècle. Il devient alors le plus grand et le plus somptueux après celui de Bastia. Il fut confisqué par l’Etat lors de la révolution. Puis il tomba en ruine et fut racheté par la famille Arrighi de Casanova qui en fit don à l’Eglise. En 1872 il fut transformé en petit séminaire. En 1905 le couvent fut de nouveau confisqué puis transformé en collège puis en caserne, il abrite aujourd’hui des résidences universitaires.

Rappelons que les franciscains joueront également un rôle clé dans la consolidation de l’Église catholique sur l’île, en rivalisant avec d’autres puissances religieuses de l’époque, telles que les bénédictins ou les dominicains, et en formant les premières générations de prêtres corses. Leur action, profondément ancrée dans le service de la communauté, a permis de maintenir jusqu’à une relation intime et fidèle entre la religion chrétienne et les traditions insulaires.

Dans tous les cas, la révolution française puis la séparation de l’Eglise et de l’Etat en 1905 ont eu un impact désastreux sur ces communautés religieuses. En effet, la dissolution des ordres religieux a conduit à la vente de plusieurs de ces couvents, désormais transformés en propriétés privées. Aujourd’hui, certains sont dans un état de ruine avancée, à l’exemple des couvents de Belgodere, du col de Saint Antoine ou de Piedicroce, alors que d’autres, comme ceux de Bastia et d’Alesani, continuent de témoigner de leur passé religieux, bien que souvent réduits à l’état de vestiges.

Les vestiges de la présence franciscaine sont partout visibles en Corse, notamment à travers des chapelles, des sanctuaires et des églises où la foi chrétienne se perpétue. Ces lieux, parfois isolés dans des montagnes escarpées, témoignent de leur héritage. Citons le couvent de Saint-Antoine à Pino dans le Cap Corse. Il a été restauré et reste un centre spirituel majeur où des retraites sont organisées. Mais aussi l’Ermitage de la Trinité près de Cervione qui est également lié à la tradition franciscaine ou encore la chapelle Notre-Dame-des-Neiges à Ghisoni, haut lieu de pèlerinage et témoignage de l’héritage des franciscains en Corse.

Les traditions religieuses subsistent

Véritable fil conducteur de la vie de l’île, la majorité des habitants continue de vivre à travers le calendrier liturgique de l’Eglise. Ces manifestations religieuses offrent une occasion de rassemblement et de renforcement de l’identité culturelle et cultuelle corse. La Semaine Sainte, marquée par la procession du Catenacciu, où un pénitent, revêtu d’une tunique et portant une croix, fait le chemin de croix à travers les rues, rappelle les sacrifices du Christ et la dévotion des Corses pour leur foi

La Fête-Dieu (Corpus Christi), célébrée avec des tapis de fleurs et des processions solennelles, est un autre moment où les Corses témoignent de leur foi, marquant ainsi leur attachement à l’eucharistie et à la présence réelle du Christ dans le sacrament. La procession de la Sainte-Croix à Sartène, l’une des plus anciennes et emblématiques, rassemble des confréries religieuses venues de tout l’île. Les chants, prières et danses traditionnelles, accompagnent cette procession qui remonte à plusieurs siècles et qui incarne la continuité de la tradition chrétienne.

Aujourd’hui la continuité de l’héritage franciscain en Corse est symbolisée dans la figure du Cardinal François Bustillo, un franciscain lui-même, nommé en 2021 à la tête du diocèse d’Ajaccio. En tant que franciscain, il incarne parfaitement les valeurs de simplicité, de fraternité et de service aux autres qui ont caractérisé l’Ordre des Franciscains depuis son arrivée en Corse.

Le Cardinal Bustillo a contribué à renforcer les liens entre l’Église et la population corse, tout en mettant l’accent sur la solidarité chrétienne et le soutien aux plus démunis. Sa vision pastorale se veut proche des racines chrétiennes de l’île, favorisant la préservation du patrimoine chrétien et la revitalisation de la foi parmi les jeunes générations. Cette piété populaire que vient célébrer le Pape François se transmet dés l’enfance et tout comme la langue corse et certaines traditions culinaires de l’ile, elle constitue l’ADN de tout Corse.

Sous sa direction, le diocèse d’Ajaccio continue de célébrer les grandes traditions religieuses corses, tout en soutenant les actions sociales et caritatives. Il incarne ainsi la continuité du travail des premiers franciscains en Corse et perpétue leur engagement envers la communauté, la foi chrétienne et la charité.

La Corse demeure donc une île où le christianisme reste profondément enraciné, grâce à l’œuvre missionnaire des franciscains qui ont joué un rôle central dans l’évangélisation de l’île au XIIIe siècle. Dans cette ile où 90 % de la population se déclare catholique les traditions religieuses corses, témoignent de la vitalité de la foi chrétienne. L’on peut regretter qu’il en soit pas toujours de même sur le continent …

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