
C’est une histoire digne des plus grands romans historiques, où foi, courage et providence se mêlent dans une aventure qui a mobilisé des passionnés du patrimoine français.
Les parents de Jeanne d’Arc offrirent un anneau à leur fille, qu’elle porta toute sa vie, le contemplant avant chaque bataille et chaque épreuve. Confisqué par les Anglais lors de son procès, il disparut pendant des siècles avant de réapparaître aux enchères à Londres en 2016. Le Puy du Fou, mobilisant de généreux donateurs, parvint à l’acquérir dans des circonstances étonnantes, chaque détail semblant marqué du sceau de la Providence.
Des experts confirmèrent l’authenticité de l’anneau, tandis que la somme exacte nécessaire à son acquisition fut miraculeusement réunie. Malgré une tentative du gouvernement britannique pour en empêcher la sortie du territoire, une intervention inattendue de la Reine d’Angleterre permit au Puy du Fou de conserver la relique en France.
Nicolas de Villiers, Président de Puy du Fou France, raconte en détail l’incroyable épopée du retour en France de l’anneau de Jeanne d’Arc qui, après six cents ans passés en Angleterre, a retrouvé sa patrie en 2016:
« Un mercredi soir de février 2016, mon père reçoit un appel d’un ami historien et avocat, Jacques Trémolet de Villers : l’anneau de Jeanne d’Arc va être vendu aux enchères à Londres dans deux jours, le vendredi 26 février. Mon père raccroche. J’attrape mon téléphone : « Jacques, expliquez-moi tout ! »
Confisqué par les Anglais au moment de son procès, l’anneau de Jeanne d’Arc s’est transmis de génération en génération, a été vendu deux fois, et finit par faire l’objet d’une vente aux enchères, qui doit débuter autour de 40 000 euros.
« A-t-on des preuves qu’il s’agit bien de l’anneau de Jeanne ?
— Tout le prouve, mais il faut vérifier les papiers qui l’accompagnent. »
Je passe toute la soirée à appeler quelques personnes fortunées pour récolter des promesses de don. Aucune n’hésite. Toutes, sans exception, tiendront parole. Le jeudi matin, je téléphone à un avocat de bonne réputation à Londres. Il envoie un photographe à la maison de vente aux enchères Timeline Auctions. Je récupère ainsi tous les documents liés à l’anneau, et les transfère à plusieurs historiens. Ils sont confiants sur son authenticité. Depuis le procès de Jeanne dans lequel elle mentionne clairement son anneau volé par les Anglais, on peut en suivre la trace jusqu’à nos jours. C’est donc bien l’anneau de la Pucelle qui est à vendre à Londres le lendemain.
À grand renfort d’appels eux-mêmes relayés, je parviens à lever la somme exacte de 397 026 euros de promesses de don. Je m’engage à ne pas dépasser ce montant, quelle que soit la tournure de l’enchère. Si la Providence le veut, nous gagnerons. Sinon, c’est que l’anneau de la Sainte est appelé à un autre destin.
Vendredi 26 février. Il est midi. L’enchère commence. Je suis en visioconférence avec mon avocat qui, lui, est dans la salle de vente. Les acheteurs viennent du monde entier, présents ou par téléphone comme moi. Très vite, le prix s’envole. Je laisse l’enchère s’essouffler. Les acheteurs abandonnent un à un. L’enchère atteint alors les 300 000 euros quand il ne reste qu’un acheteur. C’est là que je sors du bois. Mon plafond financier n’est pas si loin, mais je peux enchérir. L’adversaire est tenace. Je lui montre ma détermination. La chance me sourit : l’avocat qui me représente est aussi celui du gouvernement français. L’autre acheteur le sait. Il perd confiance, craignant des poches étatiques trop profondes pour lui. Il me laisse la main à 360 000 euros. Le marteau frappe : adjugé, vendu !
Mon avocat coupe la ligne, il doit signer les papiers officiels sur-le-champ, c’est la règle. Pendant vingt minutes, j’attends la confirmation de notre victoire, inquiet du montant des taxes qui vont s’ajouter mécaniquement au prix de vente. L’avocat me rappelle enfin et m’annonce le prix, toutes taxes comprises : 397 026 euros. La somme exacte qu’avec toutes les promesses de dons, des plus généreuses aux plus modestes, j’ai inscrite sous mes yeux comme le plafond à ne pas franchir. A l’euro près, la somme que j’ai levée en 36 heures à peine. Je suis sous le choc, bouleversé. Mon avocat n’en revient pas non plus.
L’anneau est alors placé dans un coffre. Durant le week-end, des articles de presse paraissent en France et en Angleterre sur le mystérieux acheteur de l’anneau de Jeanne d’Arc. Le gouvernement français avoue vite n’avoir pas osé prendre part à l’enchère, et nous ne nous sommes pas encore dévoilés. Le lundi, mon avocat m’appelle.
« Le Conseil National des Arts anglais va retenir l’anneau en Angleterre, au motif qu’il est un trésor national.
— J’arrive ! »
Le lendemain matin, je saute dans un petit avion privé, avec un ami photographe. Je récupère l’anneau au coffre, prétextant vouloir seulement faire des photos dans la capitale anglaise. Avec deux gardes du corps imposés par l’administration anglaise, je pose dans Londres devant l’objectif du photographe. Trente minutes plus tard, je file vers l’aéroport où l’avion est prévenu. J’ai décroché les gardes du corps. Le pilote sait qu’il faudra décoller sans trop de formalités. Je montre à la douane locale, la même mallette qu’à l’aller. Rien à déclarer. A little joke et l’affaire est dans le sac. À l’instant de décoller, je donne le feu vert à mon équipe en France : la presse est prévenue et m’attendra sur le tarmac français. Après six cents ans passés en Angleterre, l’anneau de Jeanne d’Arc est de retour sur le sol de France. Les médias s’échauffent, c’est le buzz. La France entière apprend la nouvelle et vibre avec nous.
Le mercredi suivant, le Conseil National des Arts anglais m’appelle.
« Monsieur, l’anneau ne peut quitter le territoire britannique sans une autorisation que vous n’avez pas.
— Envoyez-moi les papiers, je les signerai.
— Hors de question. Vous devez rapporter l’anneau et signer les papiers sur notre sol. Il s’agit d’un trésor national anglais. »
J’appelle le ministère de la Culture, le ministère des Affaires étrangères, personne ne veut m’aider. Le gouvernement français ne régularisera pas les papiers de la citoyenne Jeanne d’Arc, il ne la connaît pas. Le vendredi qui suit débarquent dans mon bureau deux officiers de Scotland Yard. Du pur cinéma ! Ils m’interrogent. Je leur réponds d’un ton qui se veut solennel.
« Écoutez, l’anneau, je ne l’ai plus. Je l’ai égaré.
— C’est très embêtant ça, Monsieur.
— Indeed ! »
Ils repartent bredouilles, en m’assurant que l’affaire va se corser si je n’obtempère pas. Je ne sais pas ce que je risque, mais je sens qu’ils ne plaisantent pas. Me voilà seul face à l’État anglais. David contre Goliath. Il me faut une fronde. Je décide de contacter le meilleur avocat du moment, maître Dupont-Moretti.
« Votre seul espoir, c’est la Reine », me dit-il.
Je n’ai pas le choix. De ma plus belle plume, j’écris à la reine Élisabeth II et mentionne le vœu de son aïeule, la reine Victoria, qui était favorable à ce que l’anneau rentre en France.
Les semaines passent, pas de réponse. Le Conseil National des Arts me harcèle. Scotland Yard durcit le ton. Jusqu’au jour où je reçois une lettre de Buckingham Palace. La secrétaire particulière de la Reine me répond, en s’excusant du retard avec beaucoup de délicatesse. Elle donne son verdict : « La Reine ne se mêle pas de ce genre d’affaires. Elle a néanmoins fait savoir aux autorités concernées qu’elle trouvait votre requête légitime. » Manière toute anglaise, empreinte d’une élégance diplomatique millénaire, de libérer définitivement l’anneau des griffes de l’administration britannique. Le lendemain, je reçois un appel du Conseil National des Arts qui a mené contre moi, pendant des semaines, une guerre psychologique bien légitime. Il m’annonce avec fairplay que l’affaire est soldée, et les papiers finalement en règle. Un battement de cil royal a suffi.
C’est ainsi que le Puy du Fou est devenu l’humble dépositaire d’un trésor français : l’une des seules reliques (en plus de trois lettres signées de sa main) de la plus grande sainte de notre histoire et de notre chef de guerre le plus étincelant. Depuis, l’anneau de Jeanne voyage partout en France, sous bonne garde. Car si le Puy du Fou en a reçu la charge, il appartient à la nation tout entière. L’anneau est la propriété affective et symbolique du peuple français. Il est désormais le seul objet témoin de la plus extraordinaire chanson de geste de l’histoire des hommes, l’épopée johannique. »
Récit de Nicolas de Villiers, Président de Puy du Fou France.
Avec notre partenaire : Retour de l’anneau de Jeanne d’Arc en France : une affaire providentielle (2016) – 1000 raisons de croire