La rénovation de Notre-Dame de Paris, symbole du patrimoine catholique, est de nouveau au cœur des débats. L’annonce de l’installation de vitraux contemporains réalisés par Claire Tabouret, une artiste au style résolument moderne et improvisé, continue de diviser. Stéphane Bern, ardent défenseur du patrimoine, a exprimé sa désapprobation dans questionnant le choix de l’État face aux règles qu’il impose par ailleurs.
Stéphane Bern a fustigé ce qu’il considère comme une incohérence de l’État : « Pourquoi l’État s’affranchit-il des règles qu’il impose aux autres ? ». L’animateur rappelle que les vitraux d’origine, conçus à l’initiative de Viollet-le-Duc, sont intacts et ne nécessitent aucun remplacement. Selon lui, cet ajout contemporain risque de dénaturer l’harmonie et l’esprit de la cathédrale, tout en contrevenant aux principes de conservation du patrimoine.
Il a également précisé qu’il n’est pas opposé à l’art contemporain mais que celui-ci n’a sa place que dans des contextes où les éléments anciens sont détruits ou irréparables.
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Face à ces critiques, Rachida Dati a tenu à défendre le projet, soutenant la démarche de l’archevêque de Paris Laurent Ulrich et du président Emmanuel Macron. Sur X (anciennement Twitter), elle a déclaré :
« L’effort admirable et collectif qui a permis la renaissance de Notre-Dame ne devrait pas être entaché par des querelles d’un autre âge. Patrimoine et création doivent aller de pair. »
Pour la ministre de la Culture, l’ajout de vitraux contemporains est un moyen de lier tradition et modernité, en inscrivant Notre-Dame dans une dynamique vivante. Elle a également rappelé que les vitraux d’origine pourraient être réaffectés à d’autres lieux, assurant qu’ils resteraient accessibles au public.
Rappelons qu’entre 1855 et 1865, sous la direction des architectes Jean-Baptiste Lassus et Eugène Viollet-le-Duc, un programme ambitieux de création de vitraux pour Notre-Dame de Paris a vu le jour. Ces derniers souhaitaient concevoir un décor vitré respectueux des traditions médiévales tout en répondant aux besoins esthétiques et spirituels de l’époque. Leur projet s’appuyait sur des sources historiques, des fragments anciens, et des modèles inspirés des grandes cathédrales médiévales de France.
Les vitraux furent pensés pour marier harmonieusement des verrières figuratives dans le chœur et les chapelles avec des grisailles ornementales dans la nef et les niveaux supérieurs, favorisant une unité stylistique et lumineuse. Viollet-le-Duc collabora avec les plus talentueux peintres verriers, tels que Laurent Charles Maréchal et Alfred Gérente, pionniers dans la redécouverte de la peinture sur verre. Ces artistes réalisèrent des compositions mêlant grandes figures bibliques, scènes légendaires et motifs décoratifs, en s’assurant de maintenir une cohérence avec l’architecture gothique de l’édifice.
Ce programme a été conçu pour restaurer l’harmonie et la richesse lumineuse de la cathédrale, tout en mettant en valeur l’équilibre entre l’ombre et la lumière, essentiel à son atmosphère spirituelle. Les grisailles, notamment, jouaient un rôle crucial en rehaussant la clarté de l’espace sans compromettre la solennité du lieu. Ce travail témoigne d’une recherche minutieuse de l’harmonie et de la fidélité à l’esprit médiéval de Notre-Dame.
Cependant l’opposition à Claire Tabouret n’a pas seulement mobilisé Stéphane Bern. Une pétition lancée par Didier Rykner, directeur du site La Tribune de l’Art, a déjà recueilli plus de 250 000 signatures. Par ailleurs, la Commission nationale du patrimoine et de l’architecture a rendu un avis défavorable, bien que purement consultatif.
Ce débat rappelle d’autres controverses célèbres, comme celles entourant la pyramide du Louvre ou les colonnes de Buren, qui, malgré les oppositions initiales, sont devenues des emblèmes. Cependant, pour les défenseurs du patrimoine religieux, ce parallèle ne suffit pas à légitimer une modernisation qui touche au cœur de l’identité catholique de Notre-Dame.
Dans ce contexte, les critiques de Stéphane Bern prennent une dimension particulière. Si Notre-Dame est avant tout un lieu de culte, les décisions qui touchent à son esthétique doivent refléter cette vocation. Remplacer des vitraux sobres et spirituels par des œuvres modernes pourrait brouiller cette identité.
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