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Éthiopie : le génocide des Chrétiens du Tigré à travers le témoignage de Monseigneur Medhin

Jeunes chrétiennes à Mekele - DR
Jeunes chrétiennes à Mekele - DR
« Nos programmes de guérison des traumatismes s’appuient sur la Bible, car sans la foi, à mon avis, la guérison des traumatismes n’est pas complète »,

Au cœur du Tigré, une région éthiopienne dévastée par un conflit prolongé, Monseigneur Tesfaselassie Medhin, évêque de l’éparchie catholique d’Adigrat, décrit une situation de détresse profonde. Dans un entretien accordé à l’AED (Aide à l’Église en Détresse), l’évêque expose les horreurs subies par la population locale et dénonce le génocide dont a été victime le peuple du Tigré.

« Pendant la guerre, nous étions complètement isolés. Internet et le téléphone ne fonctionnaient pas, et nous pouvions à peine sortir de chez nous parce qu’il y avait des groupes armés partout », explique Monseigneur Medhin. Ce témoignage fait écho à la réalité d’une région où la violence a laissé des cicatrices profondes et durables.

Plus d’un million de personnes tuées

Durant le conflit, qualifié de « génocide » par ses observateurs: « Les habitants du Tigré ont connu l’enfer : il y a eu des viols collectifs et des personnes assassinées devant les membres de leur famille – parmi les victimes, il y avait même des enfants et des femmes âgées. Plus d’un million de personnes ont été tuées. Des tortures et des massacres ont eu lieu. Les livraisons d’aide ont été bloquées », précise-t-il.

Le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme avait déjà, en septembre 2022, qualifié la situation humanitaire de « catastrophique », tandis que l’Organisation Mondiale de la Santé rapportait en juin 2022 que plus de 2,8 millions de personnes étaient déplacées.

Zenith.org rapporte que l’impact des violences a également été sévère sur les infrastructures locales. « Dans les zones de mon diocèse qui sont actuellement accessibles, l’Église a subi des dégâts matériels équivalents à 37 millions d’euros. Mais les dégâts en vies humaines et l’impact psychologique lié aux atrocités commises sont incommensurables. Tout le monde est traumatisé ! », souligne Mgr Medhin.

Eglise rupestre taillée à même le roc (à la main) à Lalibela (Nord de l’Ethiopie) – DR

Les viols et les tortures ont laissé des séquelles physiques et psychologiques graves. Les victimes, notamment les femmes, se trouvent dans un état de détresse extrême, souvent incapable de retourner chez elles en raison de la stigmatisation et des traumatismes subis. « Ces femmes ont été détruites physiquement et mentalement », ajoute l’évêque.

L’Eglise catholique a joué un rôle crucial

Alors que de nombreuses ONG ont quitté la région, les religieux sont restés pour fournir assistance et réconfort. « Ma plus grande reconnaissance va à mes collègues du ministère pastoral », affirme-t-il. L’engagement de l’Église est particulièrement précieux car, malgré leur faible nombre (1% de la population), les catholiques sont essentiels pour 25% de la population en raison de leur implication dans les secteurs de la santé, de l’éducation et du social.

Zenith media précise que, depuis la fin du conflit en novembre 2022, des initiatives ont été mises en place pour traiter les traumatismes. Cependant, les défis restent énormes. Les projets de guérison des traumatismes, qui s’appuient sur une dimension spirituelle inspirée de la Bible, visent à offrir un soutien psychologique adapté aux victimes.

« Nos programmes de guérison des traumatismes s’appuient sur la Bible, car sans la foi, à mon avis, la guérison des traumatismes n’est pas complète », explique Monseigneur Medhin.

Malgré l’accord de paix, la situation demeure précaire. Un tiers des 130 000 kilomètres carrés du diocèse reste occupé, avec des routes dangereuses et des écoles fermées depuis quatre ans. « Comment le monde peut-il se contenter de regarder et de rester les bras croisés ? », s’interroge l’évêque.

La situation au Tigré, marquée par la violence et la détresse, continue de nécessiter une attention internationale. Les témoignages et les appels à l’aide de ceux qui ont survécu à ces atrocités rappellent la nécessité d’une solidarité continue et d’un soutien accru pour surmonter cette crise humanitaire dévastatrice et une persécution en règle des chrétiens de cette région.

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