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Vatican : le juge antimafia Pignatone démissionne, l’affaire Emanuela Orlandi en question?

Giuseppe Pignatone - DR
Giuseppe Pignatone - DR
Le rôle de Giuseppe Pignatone dans l’enquête sur la disparition d’Emanuela Orlandi, alors qu’il était procureur à Rome, reste un mystère.

Giuseppe Pignatone, ancien président du Tribunal de l’État de la Cité du Vatican, a récemment annoncé sa démission, une décision qui soulève de nombreuses interrogations, notamment en lien avec la disparition non élucidée d’Emanuela Orlandi. Ce magistrat, connu pour son passé de procureur à Palerme et à Rome, laisse derrière lui un mandat marqué par des dossiers sensibles et des polémiques.

Une démission aux multiples lectures

La démission de Giuseppe Pignatone, qui quittera officiellement ses fonctions le 31 décembre 2024, intervient après avoir atteint l’âge limite pour exercer dans la magistrature vaticane. Le Pape François a salué son travail et accepté sa décision. Pourtant, au-delà de cette justification officielle, certains évoquent une ombre sur sa carrière. Depuis juillet dernier, il est en effet visé par une enquête de la procureure de Caltanissetta pour d’éventuels liens avec la mafia dans les années 1990.

Pietro Orlandi, frère d’Emanuela Orlandi, disparue en 1983, n’a pas tardé à réagir, déclarant sur les réseaux sociaux : « Alors il démissionne seulement pour des raisons d’âge ? Pas parce qu’il est sous enquête pour collusion avec la mafia ? Pour le Vatican, il semble y avoir deux types de bienfaiteurs : ceux qu’on récompense en les enterrant dans une basilique et ceux qu’on nomme à la tête du Tribunal. » Une référence à Enrico De Pedis, membre de la Banda della Magliana, inhumé à la basilique Sant’Apollinare avant que sa tombe ne soit exhumée en 2012 dans un contexte de controverses.

Le lien entre Pignatone et l’affaire Orlandi

Le rôle de Giuseppe Pignatone dans l’enquête sur la disparition d’Emanuela Orlandi, alors qu’il était procureur à Rome, reste un mystère. Son mandat a coïncidé avec la seconde phase de l’enquête, relancée en 2006 à la suite des déclarations de Sabrina Minardi, ancienne compagne d’Enrico De Pedis. La découverte que ce dernier était enterré à Sant’Apollinare a renforcé les spéculations autour de l’implication de la Bande de la Magliana dans cette affaire.

En 2015, sous l’égide de Pignatone, la justice a décidé d’archiver l’enquête pour manque de preuves, une décision qui a suscité l’indignation de Pietro Orlandi : « Ce n’est pas par incapacité, mais par volonté que l’affaire a été classée. Une décision gravissime. »

Quel avenir pour l’enquête Orlandi ?

Avant de rejoindre le Vatican, Pignatone avait déjà quitté son poste de procureur en Italie pour des raisons d’âge. Mais son passé professionnel est marqué par des dossiers complexes, notamment Mafia Capitale et l’affaire des liens entre mafia et marchés publics dans les années 1990. Ces enquêtes, bien que reconnues pour leur ampleur, n’ont pas été exemptes de critiques.

Alors que la commission parlementaire italienne poursuit ses investigations, aucune convocation de Pignatone n’est prévue pour le moment. Cependant, les récents témoignages du commandant de la gendarmerie vaticane, Domenico Giani, et de son adjoint de l’époque, Costanzo Alessandrini, jettent une lumière troublante sur la coopération entre l’État et le Vatican dans le cadre de cette affaire. Selon Giani, des discussions ont eu lieu pour exhumer la tombe de De Pedis, une décision perçue comme un compromis symbolique plus qu’un pas vers la vérité.

La démission de Giuseppe Pignatone, sur fond de soupçons et de polémiques, relance le débat sur la transparence au sein de la justice vaticane. L’ombre de l’affaire Orlandi, mêlant disparitions, mafia et institutions ecclésiastiques, continue de planer, laissant la communauté catholique et les proches d’Emanuela dans l’attente de réponses. La quête de vérité reste plus que jamais une urgence morale et spirituelle.

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