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Pologne : une loi pour dépénaliser les avortements illégaux, un tournant controversé

Eglise de l'Assomption de la Bienheureuse Vierge Marie et de St Joseph - DR
Eglise de l'Assomption de la Bienheureuse Vierge Marie et de St Joseph - DR
"Le drame de l’avortement, qui est toujours un drame, ne réside pas seulement dans la perte d’une vie humaine innocente, mais aussi dans la souffrance que cela provoque dans le cœur des femmes"

Le 8 novembre 2024, un projet de loi déposé par le parti de gauche Lewica a reçu un premier vote favorable au Parlement polonais. Cette proposition vise à dépénaliser les avortements illégaux, y compris ceux pratiqués dans des conditions sanitaires pouvant nuire à la santé de la femme. Un pas en avant significatif dans le débat sur l’avortement en Pologne, pays où la législation est déjà parmi les plus restrictives d’Europe.

Une dépénalisation sans garanties médicales

Le projet de loi propose de supprimer la pénalité liée à l’avortement si celui-ci est effectué sans les qualifications médicales appropriées et dans des conditions dangereuses pour la femme, notamment en dehors des hôpitaux. Cette législation pourrait permettre à n’importe quelle personne de pratiquer un avortement sans crainte de poursuites, mettant ainsi en cause la sécurité sanitaire des femmes.

De plus, la loi inclurait une disposition pour que les militants pro-choice, qui encouragent la distribution de pilules abortives illégales, ne soient plus passibles de peines de prison. En outre, la loi prévoit des peines allégées pour les médecins dont l’avortement aurait entraîné la mort de la mère, un aspect qui a suscité de vives critiques sur la responsabilité professionnelle des praticiens.

L’abandon du dogme de l’avortement « sûr »

Cette initiative met en lumière une contradiction au cœur du débat sur l’avortement : celui de la sécurité des femmes. Pendant des décennies, l’argument principal des partisans de l’avortement légal était qu’il fallait le sortir de la clandestinité, car cette dernière représente un danger pour la santé des femmes. Avec ce projet de loi, cette justification s’effondre, car il n’est plus question de protéger la santé des femmes mais de garantir l’accès à l’avortement, sans aucune garantie de sécurité sanitaire.

Un tournant éthique et législatif majeur

Ce projet législatif représente un tournant dans le paysage législatif polonais. L’abandon de l’idée d’un avortement « sûr », encadré par des normes sanitaires, est un changement de paradigme, qui semble accorder une importance primordiale à l’accès à l’avortement, sans prendre en compte les risques encourus par les femmes. La dépénalisation des avortements illégaux en dehors du cadre médical et hospitalier pourrait conduire à une multiplication des avortements risqués, et une minimisation des responsabilités professionnelles des médecins.

Le débat sur l’avortement en Pologne, traditionnellement dominé par l’Église catholique, qui a toujours défendu la protection de la vie, se trouve ainsi bouleversé par cette proposition de loi, qui fait tomber le prétexte de la santé de la femme pour justifier un accès sans limites à l’avortement.

Rappelons la position de l’Eglise universelle exprimée par le Pape François :

« Le drame de l’avortement, qui est toujours un drame, ne réside pas seulement dans la perte d’une vie humaine innocente, mais aussi dans la souffrance que cela provoque dans le cœur des femmes qui ont fait ce choix. » Discours du Pape François sur l’avortement, 2015

mais également la déclaration de Mgr Stanisław Gądecki (Archevêque de Poznań, président de la Conférence épiscopale polonaise) :« L’Église catholique en Pologne ne cessera de défendre la vie humaine dès sa conception, car chaque enfant est une bénédiction et un don de Dieu. L’avortement n’est pas seulement une question de loi, mais une question morale qui touche la dignité humaine et la liberté de chaque être humain. » Déclaration de Mgr Gądecki, 2019

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Une société polonaise divisée sur la question de l’avortement

La Pologne, traditionnellement perçue comme un bastion de l’Église catholique en Europe, se trouve au cœur d’une division croissante sur la question de l’avortement. L’Église catholique polonaise, par le biais de ses dirigeants, continue de défendre la vie et la dignité humaine en condamnant fermement l’avortement, tandis qu’une partie de la société semble de plus en plus favorable à une libéralisation des lois sur l’avortement, poussée par l’argument des droits individuels des femmes.

Cette situation reflète une profonde fracture au sein de la société polonaise sur la manière de concilier les valeurs traditionnelles avec les exigences contemporaines en matière de droits des femmes.

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