Le décret de nominations publié le 2 juin 2025 par le diocèse de Toulouse a révélé des décisions qui suscitent la stupéfaction. Parmi elles, celle du père Dominique Spina, condamné en 2006 pour le viol d’un mineur, nommé chancelier et délégué épiscopal aux mariages. Une désignation qui pose de graves questions sur la cohérence de l’engagement de l’Église en matière de lutte contre les abus.
Ce prêtre a pourtant été condamné en 2005 à quatre ans de prison ferme pour le viol d’un lycéen en 1993, dans le diocèse de Bayonne, alors qu’il exerçait un rôle de directeur de conscience auprès de la victime. Sa peine a été confirmée en appel en 2006.Selon les éléments rapportés à l’époque par la presse régionale, le père Spina avait affirmé qu’il s’agissait d’une « relation consentie ». Le tribunal, lui, avait retenu l’abus d’autorité et jugé que la relation relevait clairement d’un viol, commis dans un cadre d’emprise spirituelle. La gravité des faits, leur nature criminelle et la position occupée par le prêtre ne laissent guère de place à l’ambiguïté.
Après avoir purgé sa peine de prison, Dominique Spina a été accueilli dans le diocèse de Toulouse. Il y a exercé des fonctions pastorales, notamment comme curé de l’ensemble paroissial de Fronton-Bouloc-Castelnau-d’Estrétefonds. En 2016, il a quitté cette responsabilité à la suite d’interrogations relayées dans les médias. Le diocèse avait alors souligné qu’il n’était pas en contact direct avec des mineurs.Sa récente promotion à la chancellerie, organe central de l’administration canonique du diocèse, surprend par son contraste avec les engagements affichés par l’Église de France depuis la publication du rapport de la CIASE en 2021. Le chancelier est notamment responsable de la rédaction, de la conservation et de l’authenticité des actes officiels du diocèse. Quant au rôle de délégué épiscopal aux mariages, il touche directement à l’accompagnement pastoral de fidèles dans un sacrement central de la vie chrétienne.
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Aucune justification publique n’a été donnée par l’archevêque de Toulouse, Mgr Guy de Kerimel. Ce silence ne fait qu’alimenter le trouble. Plusieurs fidèles ont exprimé leur incompréhension, certains dénonçant un retour à des pratiques de silence et de gestion interne contraires aux principes de transparence désormais requis.Dans le même décret du 2 juin, une autre nomination interroge : celle de Mgr Jean-Pierre Batut, évêque émérite de Blois, comme délégué épiscopal pour les séminaristes. Son passage dans le diocèse de Blois, marqué par un net recul des vocations, n’avait pas laissé de souvenir marquant. Lui confier aujourd’hui la formation des futurs prêtres dans un diocèse en difficulté sur ce plan paraît, là encore, difficile à justifier.
Alors que l’Église affirme vouloir faire de la sécurité des plus vulnérables une priorité, ces nominations posent une question de fond. Peut-on continuer à confier des responsabilités aussi sensibles à des hommes dont le passé entache la crédibilité de l’institution ? Le droit à la réinsertion peut-il primer sur la confiance des fidèles et la cohérence du témoignage ecclésial ? En l’absence d’explication claire, le diocèse de Toulouse laisse la question ouverte,au risque de voir la méfiance grandir.